#304 « Louer Dieu, est-ce possible ? »

Alors que je rédige ces lignes, je suis à Lourdes où nous, évêques, sommes ensemble pour notre assemblée d’automne, avec des délégués étrangers et des fidèles laïcs qui apportent leur expertise sur bien des sujets. Nous avons appris la merveilleuse nouvelle de la venue du pape François à Ajaccio le 15 décembre. Son amitié avec Mgr François Bustillo que le pape a nommé cardinal motive sûrement cette rencontre qui parlera de la dévotion populaire. Nul doute que les corses accueilleront le successeur de l’apôtre Pierre avec l’enthousiasme spirituel qu’ils savent exprimer lors de leurs fêtes patronales si hautes en couleur. Tous les villages corses ont des chapelles où est vénérée Notre-Dame. La foi exprimée par ces dévotions doit devenir toujours plus une foi vécue et inspirante. C’est pourquoi, nous prions la Vierge pour le Saint-Père et pour qu’au sein des familles corses naissent des vocations chrétiennes nombreuses et particulièrement des consacrés et des prêtres. 

J’aime ce merveilleux site de Lourdes, et en particulier prier à la grotte de Massabielle tôt le matin. Il est vrai qu’à cette période, en novembre, nous connaissions le froid, la pluie et la neige. Or il fait beau et doux, le ciel est bleu. Il y a peu de pèlerins, la saison est finie, tout y est si calme, il y a ce silence dont Bernadette bénéficiait quand elle ramassait du bois pour le foyer familial. Tout est beau, les feuilles sont colorées, le Gave roule des eaux tumultueuses où des oiseaux pêchent. Prières, chapelets, messes continuent en des langues diverses. Notre-Dame reçoit ses enfants, les console et les conduit à son Fils Jésus. Elle nous invite à louer Dieu et à rendre grâce à son Fils Jésus. Comment louer le Seigneur ? Les psaumes ont toujours été une source d’inspiration, ils rythment les offices et la liturgie des heures, dans tous les monastères et dans la vie spirituelle de beaucoup de fidèles laïcs. 

Ici à Lourdes m’est donné de méditer avec le psaume 33. Il est attribué à David qui doit fuir le roi Saül qui veut sa mort. David ne peut résister à l’armée royale, surtout il ne veut pas porter la main sur le roi qui est oint par la volonté divine. Il doit trouver refuge ailleurs en attendant que Dieu le délivre. Sa vie ne tient qu’à un fil et il met toute sa confiance en celui qu’il adore, le Dieu de ses pères. 

J’aimerais vous proposer ce psaume pour éclairer votre journée. Il s’ouvre par un appel à la louange : « Je bénirai le Seigneur en tout temps, sa louange sans cesse à mes lèvres. Je me glorifierai dans le Seigneur : que les pauvres m’entendent et soient en fête ! Magnifiez avec moi le Seigneur, exaltons tous ensemble son nom. » Se tourner vers le Seigneur dès le réveil, n’est-ce pas disposer tout son être, son âme et son esprit et même son corps à entrer dans cette attitude joyeuse, fruit de la rencontre avec le bien-aimé à qui nous consacrons nos rencontres et nos travaux ? La louange nous décentre de nous-mêmes et elle nous oriente vers le Seigneur. Cette louange rejoint celles des chrétiens vivant en tous lieux, catholiques, orthodoxes et protestants, qui reprennent ces versets bibliques pour s’ouvrir à la puissance du Saint-Esprit. « Moi, je crie vers toi, Seigneur ; dès le matin, ma prière te cherche » (Ps 87,14). Quelle joie de nous relier à la source de l’amour, tous ensemble au nom du Seigneur.

L’homme est en recherche de sens. Nous ne pouvons pas vivre sans un but ou un projet qui apporte l’espoir que nous avançons vers un certain bonheur. Cependant l’expérience montre que les satisfactions humaines et matérielles, même celles qui apportent du confort à la vie, ne satisfont pas notre attente profonde. Aussi, comme le psalmiste le chante, nous avons un même désir : « je cherche le Seigneur, il me répond : de toutes mes frayeurs, il me délivre. Qui regarde vers lui resplendira, sans ombre ni trouble au visage. Un pauvre crie ; le Seigneur entend : il le sauve de toutes ses angoisses. » L’écriture sainte dit « qui cherche le Seigneur ne manquera d’aucun bien ». Le Seigneur Jésus est présent comme il nous l’a promis, « je suis avec vous tous les jours » (Mt 28,20). Il connaît nos besoins, il donne le meilleur et ce meilleur est sa propre vie : « ma vie nul ne la prend mais c’est moi qui la donne » (Jn 10,18).

Mais qui est le Seigneur que le psalmiste désigne à l’époque du roi David ? En réalité, tel un prophète, il annonce le Christ, Jésus le fils de Marie né à Bethléem, Dieu fait homme. Les psaumes sont une prophétie sur le messie attendu. Quand nous le regardons, nos cœurs sont rassasiés et avec lui nous ne perdons pas courage, nous sommes consolés et protégés. Ainsi le psalmiste ajoute « l’ange du Seigneur campe à l’entour pour libérer ceux qui le craignent. Goûtez et voyez : le Seigneur est bon ! Heureux qui trouve en lui son refuge ! » Que craindre désormais si le Seigneur est avec nous ? Le verset suivant interpelle : « Saints du Seigneur, adorez-le : rien ne manque à ceux qui le craignent. Des riches ont tout perdu, ils ont faim ; qui cherche le Seigneur ne manquera d’aucun bien. Venez, mes fils, écoutez-moi, que je vous enseigne la crainte du Seigneur. » N’est-ce pas merveilleux d’être accompagné, de ne plus se sentir seul, de faire l’expérience de marcher en présence de Dieu ? Jésus révèle qu’il est amour et que cet amour nous est destiné sans limite aucune. Maintenant comprenons qui sont les saints dont parle le psalmiste. N’est-ce pas chacun de nous, fils et fille de Dieu à qui est destinée la promesse ? Ne sommes-nous tous pas faits pour la sainteté ? Effectivement chacun a vocation à vivre dans la lumière divine. Habités par le Saint-Esprit nous portons en nous sa lumière telles des lampes qui ne se cachent pas mais sont posées sur le lampadaire afin d’éclairer la maisonnée. 

Bienheureux ceux qui mettent leur confiance en lui. « Qui donc aime la vie et désire les jours où il verra le bonheur ? » dit encore le psaume. Oh Seigneur, je te cherche et je désire pour mes proches ce bonheur dont il est ici question. Conseille-nous, guide-nous sur le chemin de la vie, car si nous nous perdons, il y a trop de souffrances. « Garde ta langue du mal et tes lèvres des paroles perfides. Évite le mal, fais ce qui est bien, poursuis la paix, recherche-la. » Tout n’est-il pas dit ici ? Pourquoi en notre société devrions-nous être égarés en laissant le mal nous atteindre ? Chercher le bien et la lumière, voici notre destinée. Dieu donne sa paix, comme il l’a promis, non pas la paix du monde qui est cet équilibre instable entre des forces opposées, mais bien la paix de l’âme quand tout est harmonieux. Car dit le psalmiste « Le Seigneur regarde les justes, il écoute, attentif à leurs cris. Le Seigneur affronte les méchants pour effacer de la terre leur mémoire. Le Seigneur entend ceux qui l’appellent : de toutes leurs angoisses, il les délivre. Il est proche du cœur brisé, il sauve l’esprit abattu. Malheur sur malheur pour le juste, mais le Seigneur chaque fois le délivre. Il veille sur chacun de ses os : pas un ne sera brisé. Le mal tuera les méchants ; ils seront châtiés d’avoir haï le juste. Le Seigneur rachètera ses serviteurs : pas de châtiment pour qui trouve en lui son refuge. » Nous rencontrons parfois des méchants ou nous sommes atteints par les angoisses. Mais nous sommes gardés du mauvais, nous avançons et sommes tendus vers le but, en demeurant en Dieu en attendant la vie éternelle. 

C’est la fin de ce psaume mais c’est le début de cette journée que nous savons éclairée par la grâce divine. Pourquoi ne pas recopier l’un des versets sur un carton bristol afin de le relire tout au long du jour ? Personnellement, je garderais volontiers « Qui regarde vers lui resplendira, sans ombre ni trouble au visage. » J’y vois une invitation à adorer en présence de Jésus. Je peux le retrouver dans le silence d’une chapelle, dans la pénombre de la crypte de la cathédrale, lors de la communion eucharistique mais encore dans la rencontre d’un frère, lors d’un échange entre amis sur les bienfaits de Dieu ou un partage joyeux d’une authentique fraternité. Oui chers amis, prenons le temps de le regarder avec les yeux de l’âme car il habite en nous et il nous envoie porter sa lumière à ce monde. Le monde pourrait chercher à nous faire taire mais celui qui le porte en lui brillera du feu de l’Esprit Saint et personne ne pourra le voiler. C’est là une grâce à demander à Dieu notre Père qui place en chacun de nous toute son attente afin que le Royaume brille et accueille les hommes et les femmes qu’il veut rassembler autour de lui. Ce jour, prions Notre-Dame, elle qui est devenue la lumière de la cour céleste par le resplendissement de sa sainteté. Elle prie Dieu pour chacun de nous. Merci Marie.

Je vous salue Marie. 

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Votre intention sera confiée à la prière des sœurs de Saint-Paul de Chartres.