#331 « A la suite de saint Jeanne d’Arc, cherchons le Ciel ! »

À Orléans, la Ville est pavoisée chaque année de toutes les couleurs pour la fête de sainte Jeanne d’Arc. Le 8 mai 2025, j’eus la joie de présider en son honneur une magnifique messe, aussi j’aimerais vous parler d’elle. Jeanne reçut ce beau prénom de ses parents, lorsqu’elle devint enfant de Dieu, par son baptême en l’église Saint-Rémy à Domrémy. S’ouvrit alors pour elle, pour l’Église et pour la France un chemin d’excellence chrétienne que personne n’aurait pu anticiper et qui permit peu à peu la libération de notre pays occupé par les anglais. Pourtant son enfance campagnarde fut humble et cachée. Comme tant de fillettes, elle était bergère, si sage et priante que les garçons de Domrémy la regardaient de loin car sa retenue et sa pureté les troublaient ; ce sera aussi le sentiment des soldats sur les champs de bataille, où elle parait tel un lys blanc que tous admirent. Son cœur était tout à Dieu. Elle avait reçu la foi de sa famille. Elle travaillait durement en chantant et en louant Dieu pour la beauté de la création jusqu’à son appel à partir rendre son pays au roi de France. 

Jeanne ne cherchait pas la gloire. Elle désirait seulement, mais ardemment, faire la volonté de Dieu. Elle était confiante que si elle faisait la volonté de Dieu, le Seigneur Jésus-Christ donnerait la victoire à cette entreprise improbable. Sa parole encourageait les gens d’armes, des simples soldats aux officiers, car son cœur recevait ses ordres de l’Esprit de Dieu. Quelle sagesse l’animait ? Certes non pas celle des grands du monde ni des capitaines de haut rang, pas plus celle des princes, mais une sagesse vivante, une grâce forte et douce à la fois, un élan intérieur dont elle comprenait la voix ayant pris la belle habitude de l’écouter depuis sa tendre enfance. Saint Paul affirme : « Ce qui est d’origine modeste, méprisé dans le monde, ce qui n’est pas, voilà ce que Dieu a choisi, pour réduire à rien ce qui est » (1 Co 1, 28). Dieu ne parle pas dans le fracas de la tempête, ni par le feu qui détruit, il vient dans le murmure d’une brise légère et parle à celui qui est tout disposé à l’écouter, celui qui a le cœur ouvert. Il choisit des personnes humbles comme la Vierge Marie pour venir vers nous et révéler la voix de l’Évangile. Ainsi, personne n’est prophète au nom de Dieu par la force et la puissance des armes, et le véritable messager prête humblement sa voix afin que la parole de Dieu inspire les choix des hommes. Jeanne fut l’authentique témoin de Dieu qui lui fit confiance : simple bergère elle se rendit à la cour du roi de France afin de parler au nom de Dieu au monarque. Charles Péguy écrira que Jeanne « voyait clair parce qu’elle voyait Dieu. » Une fois lancée, plus rien ne la détournera de sa mission, sinon la méchanceté et l’aveuglement de ceux qui la condamneront. 

Ainsi, personne ne peut s’enorgueillir au nom de Dieu. La mémoire du peuple chrétien ne s’y trompe pas quand elle se souvient de tous les saints et saintes tels saint François d’Assise, sainte Claire, sainte Agnès, saint Martin, et de tant d’autres visages bien aimés qui ont entrepris la montée du Carmel, cette montagne en Terre Sainte connue pour être le lieu de vie de nombreux priants dès le début du christianisme, afin d’y vivre en présence  de Dieu avec comme seule espérance la foi ancrée dans le Christ, le Verbe divin fait chair. 

Récemment c’est un autre jeune, presque encore un enfant, le bienheureux Carlo Acutis, mort en 2006 d’une leucémie à 15 ans, qui sera canonisé par le pape Léon XIV. À 7 ans, Carlo Acutis décide d’aller tous les jours à la messe pour communier et recevoir le roi des rois. Il crée des sites sur Internet, en dédie un en particulier à une centaine de miracles eucharistiques, et s’il aime le football, il encourage les jeunes à une foi vivante dans la lumière de Jésus-Christ. Le pape François le désignera comme « modèle pour les jeunes en notre ère numérique ». À travers ces visages si précoces, on saisit qu’il existe une urgence de la sainteté, car par elle se réalise le but de la vie humaine. 

Pour aller plus loin, j’aimerais retourner un peu en arrière dans l’histoire de France, pas si loin si l’on se rappelle que sainte Jeanne d’Arc rendit son âme à Dieu en 1431 à l’âge de 19 ans. Nous sommes à la fin du XIXe siècle à Lisieux. Là, une jeune carmélite de 22 ans, sainte Thérèse de l’Enfant Jésus compose une pièce de théâtre sur sainte Jeanne d’Arc dans le but de la présenter à ses sœurs contemplatives. Une première version s’intitule : « La mission de Jeanne d’Arc » puis Thérèse développe son œuvre l’année suivante pour y placer une quinzaine de figurants sur le titre « Jeanne d’Arc accomplissant sa mission ». Sans aucun doute, Thérèse admire passionnément Jeanne, qu’elle considère comme une sœur spirituelle, un modèle de courage, d’abandon et d’amour de Dieu. Elle l’a choisie comme patronne de sa vocation missionnaire. Thérèse cite régulièrement sainte Jeanne d’Arc et elle écrit une poésie pour la canonisation de Jeanne. Elle dit : « Ce que je désire par-dessus tout, c’est de devenir une grande sainte. Je voudrais imiter Jeanne d’Arc. » À l’abbé Maurice Bellière, Père Blanc et missionnaire avec qui elle correspond, elle écrit « J’ai le cœur de Jeanne d’Arc ! » car Thérèse est entrée au Carmel pour aller de victoire en victoire, sur la voie de la perfection spirituelle enseignée par sa grande patronne, sainte Thérèse d’Avila. Dans un couvent comme celui de Lisieux, on entretient une intense vie communautaire remplie d’actions répétitives qu’il convient de faire avec amour, et c’est là que s’engage le combat avec le démon qui cherche à détourner la jeune religieuse de choix si saints. Thérèse se bat avec les armes de la foi, s’appuyant sur la Parole de Dieu qu’elle lit volontiers, en connaissant par cœur le livre spirituel « l’imitation de Jésus-Christ » qu’elle porte toujours sur elle tel un bouclier face aux traits de l’ennemi. Elle dira encore « Jeanne d’Arc !… Que j’aurais voulu naître en ce temps-là pour combattre sous ses ordres ! »

Ainsi il y a bien un parallèle touchant entre ces deux saintes, Jeanne et Thérèse, leur jeunesse certes les rapproche, et surtout leur désir de sainteté, être tout à Dieu. L’Église catholique canonisera Jeanne d’Arc en 1920 et Thérèse de Lisieux en 1925, signe encore de leur proximité spirituelle. Toutes les deux entrent au Ciel à l’aube de leur jeunesse, brûlées par le feu de l’amour, certes si précoces et cependant ayant pleinement accompli leur vocation personnelle sur terre où elles laissent un héritage spirituel plein d’espérance pour les jeunes d’aujourd’hui. Quel est ce message ? 

Le message de ces saintes est que la vie mérite d’être vécue, qu’elle n’est jamais fermée à qui veut s’ouvrir à l’amour absolu pour Dieu et au don total de soi pour les autres. Notre société cherche des adultes porteurs d’une vision respectueuse de la dignité de chacun, y compris les êtres fragiles et dépendants. Des adolescents m’écrivent pour demander le sacrement de la confirmation en disant qu’ils ne supportent pas les injustices, le harcèlement, les insultes, le mal et la guerre. La venue de beaucoup aux célébrations des cendres, du carême et des jours de Pâques fut une surprise et pose une interrogation sur leurs motivations. Recherchent-ils Dieu ? Pourtant Jésus-Christ ne propose pas un chemin facile, au contraire il annonce qu’il est étroit et qu’il monte durement en haut de la montagne, mais que parvenu au sommet, chacun pourra contempler l’infinie beauté de la création et rencontrer le Seigneur. Jésus nous prévient « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. Car celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perd sa vie à cause de moi la gardera. » (Mt 16, 24-25) Sainte Jeanne d’Arc nous indique un chemin, et sainte Thérèse de l’Enfant Jésus l’a pleinement emprunté certes différemment, la première sur les champs de bataille, la seconde dans l’espace clos du Carmel. Or toutes les deux pouvaient regarder vers le bleu du Ciel et y voir la présence de Dieu. 

À sainte Marguerite-Marie Alacoque Jésus avait dit : « Si tu le crois, tu verras la puissance de mon Cœur dans la magnificence de mon amour ». Jeanne, Thérèse, Carlo, François et Claire ont vu la puissance d’amour de Dieu. Prions maintenant pour les jeunes de notre époque, qu’ils découvrent la joie de se donner et l’amour de Jésus qui se donne à eux. Notre Père.

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