Le Pape saint Jean XXIII avait l’intuition que l’Église devait entrer en dialogue avec le monde contemporain, la société des trente glorieuses, après la seconde Guerre Mondiale, prise dans une révolution qui bouleversait les rapports humains, la famille, le travail, l’habitat et les relations internationales. Le pape désirait pour l’Église un aggiornamento illuminé par le Saint Esprit. Le concile Vatican II, événement extraordinaire rassemblant quelques 2400 évêques du monde entier, se superposait en France avec les évolutions sociales qui allaient conduire à la révolution de 1968 et leurs basculements culturels considérables. L’Église enracinée dans la tradition devait entrer en dialogue avec la société pour l’évangéliser alors que le marxisme et l’athéisme militant tenaient le haut du pavé dans bien des cercles intellectuels. Aujourd’hui, un tel dialogue continue, notamment dans les lieux de recherche comme les Bernardins ou l’Institut Catholique de Paris. Depuis lors, la société a profondément changé. Elle est marquée par la surconsommation, l’individualisme, l’écologisme et la mise en cause de toute forme d’autorité. On parle de société « liquide » pour exprimer que les piliers de stabilité de la vie sociale enracinée auparavant en un même lieu n’existent plus : les personnes changent de travail, d’habitat, voire de famille plusieurs fois au cours de la vie active. Le dialogue reste difficile car il nécessite de connaître profondément l’Évangile de Jésus-Christ et d’en vivre, et simultanément de ne pas craindre de rencontrer des personnes, croyantes ou non croyants, souvent attachées à d’autres religions dont la conception de la vie diffère au point que l’on ne se comprend pas. Or les premiers apôtres osèrent cela. Non sans mal, comme saint Pierre qui accepte de se rendre chez Corneille, un païen romain, à qui l’Esprit a parlé. Pour Pierre, juif, il y avait dans sa culture un interdit absolu de se rendre chez un païen. Pierre découvre que l’Esprit l’a précédé et il baptise toute cette famille. Les apôtres annonçaient le Royaume à ceux pour qui ce message était une nouveauté totale. Nous pouvons encore citer Philippe dont la route croise l’eunuque de la Reine de Candace d’Éthiopie qui lit le prophète Isaïe sans comprendre, et Philippe le baptise. L’amour qu’ils partageaient les uns pour les autres touchait le cœur des auditeurs et attirait de nouveaux disciples. Ainsi nous voyons que leur foi solide en Jésus mort et ressuscité les unissait pour la mission et qu’ils osaient aller à la rencontre des cultures de l’Empire romain pour y être témoins de la nouveauté de l’Évangile.
Si nous ouvrons l’Évangile, nous voyons Jésus appeler les premiers disciples. Ils ne sont pas des hommes parfaits, pourtant Jésus comptera sur eux pour fonder son Église. C’est à eux qu’il confie les clés du Royaume, qu’il donne de baptiser, qu’il confère le pouvoir de pardonner au nom de Dieu et ils les appellent à faire des disciples. C’est par la puissance de l’Esprit Saint agissant à tout instant et de manière plus signifiante le jour de la Pentecôte, que ce premier groupe formant l’Église primitive sort avec audace pour témoigner de la victoire de la vie sur la mort et du don du salut que Jésus fait à tout homme.
Aujourd’hui, ce chemin missionnaire continue par des sentiers escarpés. Heureusement de nombreux fidèles laïcs se forment et sont engagés. Mais nous vivons simultanément un temps douloureux de purification suite aux abus. Nous, fidèles de l’Église, sommes les héritiers de la promesse et les pierres vivantes de l’Église où demeure le bon grain et l’ivraie. Pour accueillir ce merveilleux trésor du salut confié par Jésus, nous sommes réellement des vases très fragiles. Actuellement, il n’est pas de mois sans apprendre la nouvelle de quelque abus qui met en cause telle personne connue comme le mosaïste jésuite Marko Rupnik qui aurait abusé de religieuses en Slovénie dans les années 80 et dont les œuvres sont partout, notamment sur la façade de la basilique de Lourdes. Comment garder notre Espérance ? Comment désirer être acteur au sein de notre Église ? Certains fidèles s’en éloignent, d’autres s’accrochent à la prière, certains préfèrent fermer les yeux peut-être. L’arbre mort ne doit pas cacher la forêt vivante, et nous voyons que les fidèles tiennent leur engagement et servent leurs frères. Seul un surcroît de fraternité donnera le témoignage que les enseignements de Jésus ne se perdent pas à cause du péché. Prendre soin les uns des autres est une belle mission que nous pouvons chacun porter.
Lors des messes dominicales, quand nous proclamons le credo, nous professons l’Église, une, sainte, catholique et apostolique. Cette expression antique semble incongrue face aux péchés des fidèles du Christ, laïcs et clercs. Comment comprendre ? « Que tous soient un comme, toi Père et moi sommes un » dit Jésus. Jésus a prié pour que ses disciples soient unis dans une même communion, c’est lui qui fait notre unité. La sainteté de l’Église advient par la communication de la sainteté de Jésus, car Dieu seul est saint. Si l’Église est sainte de par la sainteté de celui qui en est la tête, Jésus-Christ, nous cheminons vers la sainteté, réelle quoique inachevée. L’Église est catholique, ce mot signifiant universel, car Jésus désire ardemment rassembler dans son Royaume les hommes et les femmes de toutes nations et de tous temps. Elle est enfin apostolique car, par la volonté de Dieu, Jésus a confié aux apôtres la charge de gouverner, de sanctifier et d’enseigner le peuple de ses enfants. Cette charge, les évêques la portent avec l’ensemble du peuple de Dieu, prêtres, diacres et fidèles laïcs. La charge est lourde, mais nous savons pouvoir compter sur le soutien merveilleux des fidèles qui mettent leurs talents, leurs compétences et leurs charismes au service de la mission commune. Ces fidèles ne doivent pas se taire, c’est leur droit et leur devoir d’exprimer leurs souhaits et leurs remarques, leurs appréhensions et leur enthousiasme. C’est en se mettant à l’écoute de la Parole de Dieu, méditée dans la lumière du Saint Esprit, que la communauté ecclésiale discerne les justes voies de la mission. L’Église n’est pas un parti politique gouverné par une majorité selon des revendications ethniques ou sociales. Nous formons, comme Église institution et pneumatique, une seule assemblée pour vivre le culte véritable dans l’adoration de Dieu et pour rejoindre surtout les détresses de cette société afin d’annoncer la joie du salut et la vie éternelle. Face aux diverses situations, réelles et difficiles, nous continuons le chemin. La diaconie diocésaine est présente pour accueillir toutes les propositions d’initiatives nouvelles.
Comme saint Paul, nous sommes tendus vers l’avant. Noël n’est-elle pas une merveilleuse fête de la présence et de l’espérance ? Le Verbe divin, qui fait toute chose par sa parole, vient dans le sein de la vierge Marie. Il s’y blottit discrètement par la puissance du Saint Esprit, et il y demeure en gestation neuf mois jusqu’à la naissance qui advient en cette étable pauvre et isolée destinée à mettre à l’abri les bêtes. Là naît le Fils du Très-Haut, le sauveur de l’humanité, le soleil levant qui vient visiter et transformer ce monde pour lui ouvrir la porte du salut. Sans être oublieux du nécessaire appel à nous convertir chacun, nous entrons en adoration de cet enfant-Dieu qui s’abaisse en prenant notre condition humaine. Là est le centre et le vrai commencement de la foi catholique, c’est-à-dire l’incarnation ou la venue de Dieu dans la condition humaine. Là est le mystère qui dit simultanément la petitesse et la toute-puissance divine. N’est-ce pas la nécessité de l’amour que de se faire proche et humble pour s’offrir pour le bien des autres ? Notre contemplation face à la crèche se nourrit du chant des bergers qui, bientôt, arriveront auprès du nouveau-né, informés par les anges. La juste attitude de foi ne peut exclure la louange qui n’ajoute rien à Dieu mais nous rapproche de lui. En famille, pourquoi ne pas apprendre ensemble les chants de Noël ?
Je vous invite à prier beaucoup et paisiblement en ces jours qui précèdent cette belle fête. Et comme je vous le proposais dans mon dernier message, ouvrons nos cœurs à ceux et celles qui sont seuls et isolés, proches de nous, pour leur partager la joie qui nous vient de l’Esprit.
Je vous invite à prier et à chanter Marie, en reprenant ce chant bien traditionnel.
Ave, Ave, Ave Maria !
- Vierge Sainte, Dieu t’a choisie
Depuis toute éternité
Pour nous donner son Fils bien-aimé.
Pleine de grâce, nous t’acclamons. - Par ta foi et par ton amour,
O Servante du Seigneur,
Tu participes à l’œuvre de Dieu.
Pleine de grâce, nous te louons. - En donnant aux hommes ton Fils,
Mère riche de bonté,
Tu fais la joie de ton Créateur.
Pleine de grâce, nous t’acclamons. - Tu demeures près de nos vies,
Nos misères et nos espoirs,
Pour que la joie remplisse nos cœurs.
Pleine de grâce, nous t’acclamons. - Tu nous mènes auprès de ton Fils
Qui nous parle de l’amour
Et nous apprend ce qu’est le pardon.
Pleine de grâce, nous t’écoutons. Si ce message soutient votre foi
et votre méditation, pourquoi ne pas le faire suivre à vos amis ?