Nous avons un nouveau pape qui nous guidera dans les années à venir. Nous sommes nombreux à nous réjouir du choix du cardinal Robert Francis Prévost. De nationalité américaine et péruvienne, il incarne le berger missionnaire, zélé et donné, parti loin de son pays pour le bien de populations pauvres. En choisissant le prénom de Léon il se place à la suite d’une lignée de papes remarquables, notamment saint Léon le Grand qui vint au-devant d’Attila et des Uns et déjoua leur projet d’invasion de Rome, et surtout Léon XIII qui écrivit plusieurs textes majeurs dont l’encyclique Rerum Novarum sur la doctrine sociale de l’Église dans la société industrielle du XIXe siècle. Une religieuse qui travaille avec le nouveau pape le présente comme un homme serein ayant su créer un climat familial au sein du dicastère pour les évêques à Rome. C’est d’ailleurs sa sérénité, lors de son apparition au balcon de la loggia de la Basilique saint Pierre qui a frappé les commentateurs. Beaucoup de retenue et d’émotion émanaient de lui devant la foule rassemblée jusqu’au Tibre pour être bénie par lui. On pourra se rapporter aux articles des journaux pour mieux le connaître. Nous accueillerons ses premières interventions et textes avec intérêt.
Par cette élection, l’Église catholique donne aux sociétés contemporaines un message de paix – les premiers mots du Pape – et promeut la recherche du bien commun par l’écoute des motions du Saint Esprit et la force de l’Évangile. Chaque cardinal votait en disant une formule précise : « J’en appelle à témoin le Christ notre Seigneur qui me jugera tandis que j’élis celui que j’estime digne d’être choisi par la volonté de Dieu » ce qui exclut tout choix partisan et toute recherche d’intérêt personnel. Ce mode de scrutin pourrait-il inspirer nos démocraties ? L’arrogance affichée par beaucoup au sein du monde politique et le refus de se soumettre à une sagesse transcendante permettent d’en douter. Par son mode d’élection et de gouvernement, l’Église se différencie donc nettement des procédés des puissants, des partis et des loges. Elle montre qu’une voie au service de tout homme existe. Alors qu’un bouleversement anthropologique se profile par la possible promulgation en France de la loi sur la fin de vie, nous affirmons que la fraternité ne peut jamais contredire le commandement « tu ne tueras pas ». Notre pape Léon XIV aura, nous n’en doutons pas, des paroles claires pour affirmer la dignité de chaque personne, à commencer par les plus vulnérables que certains préfèrent éliminer.
L’élection de Léon XIV rappelle le rôle de la succession apostolique, notion théologique dont la portée est essentielle. En effet le Christ a confié à saint Pierre et aux apôtres la charge de paître le troupeau en leur imposant les mains afin qu’ils reçoivent le pouvoir de le rendre présent par la prédication et les sacrements que lui, Jésus, a institués. Eux-mêmes à leur tour en vieillissant et en se dispersant géographiquement ont choisi des hommes nouveaux pour prendre leur suite et ils leur ont transmis ce même pouvoir par l’imposition de leurs mains. Cela s’est reproduit dans l’Église catholique et les Églises orthodoxes jusqu’à ce jour. Ainsi il appartient au pouvoir des évêques, apôtres de Jésus, de le rendre présent et agissant par les sacrements. La succession apostolique garantit, et elle seule, que le pain et le vin deviennent le corps et le sang du Christ lors de la consécration eucharistique, que le pardon des péchés soit réellement donné au pénitent par la confession, que le confirmand reçoive la puissance du Saint Esprit lors de sa confirmation. Pour élargir la réception de ces bienfaits à tous les fidèles, chaque évêque ordonne des prêtres qui célèbrent en son nom dans les paroisses et les lieux de mission.
Léon XIV succède au pape François et devient le 267ème successeur de Pierre. Il est Pierre pour l’Église, c’est-à-dire celui à qui Jésus dit aujourd’hui « je te le déclare : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle » (Mt 16,18) puis « Je te donnerai les clés du royaume des Cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux » (Mt 16,19). Au bord du lac après la résurrection, Jésus confirme Pierre et donc maintenant Léon XIV par ces mots « Sois le berger de mes brebis » (Jn 21,17). Si elle comprend de lourdes tâches administratives, la charge que doit dorénavant assumer le pape Léon XIV est avant tout celle d’être le pasteur qui ne perd aucune des brebis que le Père du Ciel lui confie. Le charisme lui est donné avec la fonction pontificale et sa personnalité se déploiera avec le temps. Nul doute, comme il l’a dit dès son élection, qu’il aura à cœur de poursuivre le parcours synodal initié par le pape François. L’Église continue à se mettre à l’écoute du plus grand nombre, tant à Rome que dans les diocèses en invitant les fidèles laïcs à exprimer les appels de l’Esprit. Nous avons besoin d’une coresponsabilité entre les états de vie afin de déployer l’élan missionnaire que notre nouveau pape appelle déjà de ses vœux.
Le pape Léon XIV est maintenant un guide pour un milliard quatre cents millions de catholiques. Nous savons que sa voix porte au-delà de nos communautés et interpelle les personnes engagées en politique, notamment pour la paix et contre la guerre, pour le respect de toute vie face au projet monstrueux du suicide assisté et de l’euthanasie, pour l’éducation des enfants face aux maltraitances psychologiques et physiques, pour la protection de la nature face aux destructions irréversibles d’espaces naturels et autres thématiques sociétales. L’intérêt des médias pour cette élection manifeste que ce nouveau pasteur était attendu. L’Église n’a pas d’armée et bien peu de pouvoir politique, mais elle possède l’Évangile, une liturgie, un enseignement, des communautés engagées dans le monde entier, elle est une voix qui crie comme saint Jean le Baptiste dans le désert. Depuis deux mille ans, elle est au cœur de la vie des hommes qui portent une parole de charité et d’espérance. Si beaucoup l’ignorent, des personnes s’ouvrent à ses paroles et viennent vers elle. Chaque baptisé devient son porte-parole en affirmant que l’amour est la seule voie et le seul avenir pour l’homme. Chacun peut exprimer que la miséricorde divine est destinée à tous, chrétiens ou non.
Face aux défis et aux drames actuels, beaucoup de gens, et parmi eux des catholiques, rentrent la tête dans les épaules en espérant que la tempête les épargnera ; ils vivent en profitant des biens de consommation avec l’idée que l’humanité se remettra de ses erreurs, ils jouissent des loisirs pour jeter un voile pudique sur les questions économiques et financières qui frappent la France menacée de banqueroute et de ruine. Face aux besoins d’entraide, pourquoi l’engagement personnel au bénéfice de la société n’est-il pas au rendez-vous dans la vie de beaucoup de baptisés ? Possiblement parce que le chemin de la conversion est difficile et exigeant. Suivre le Christ demande de renoncer et de marcher en avant, comme le nouveau pape qui ne retournera pas chez lui. « Quiconque met la main à la charrue, puis regarde en arrière, n’est pas fait pour le royaume de Dieu », dit Jésus (Lc 9,62). La porte est étroite et ceux qui sont encombrés par leur réputation mondaine ne peuvent pas la franchir ; or la liberté authentique se situe au-delà de la porte sous la conduite de l’Esprit, en acceptant de laisser derrière soi tout conformisme ecclésial, tout attachement à un clan ou encore sa sensibilité individuelle qui fait obstacle à la rencontre d’autres baptisés venus de cultures différentes. La foi chrétienne demande de donner notre vie. Or personne ne donne sa vie sans une rencontre profonde avec Jésus, ce qui nécessite une vie de prière fidèle et une vie sacramentelle soutenue. Personne ne donne sa vie pour suivre le Christ sans une véritable familiarité avec la Bible qui enseigne le chemin. Personne ne donne sa vie dans l’Église s’il ne fait pas l’expérience d’une fraternité ouverte à tous dans la puissance du Saint Esprit.
L’arrivée du pape Léon XIV est une joie. Soyons attentifs à ses paroles, qui nous nourriront, nous encourageront, nous guideront. En ces semaines du temps pascal qui apportent la lumière de la résurrection et nous demandent de nous préparer à une effusion de l’Esprit renouvelé, nous pouvons nous réunir et réfléchir à la vocation de nos communautés en vue d’un témoignage donné aux gens du dehors. Saint Pierre s’est rendu chez Corneille, un païen (Cf. Act 10,17-11,20), et il a constaté que cet homme et toute sa famille avaient reçu le Saint Esprit, c’est pourquoi il les baptise tous. Aujourd’hui des hommes et des femmes sont touchés par la grâce et attendent que nous venions à eux. Sachons discerner ces appels et avoir le zèle d’y répondre. Jésus-Christ est le nom de notre maître et Seigneur. Le pape offre sa vie à son service. Nous aussi devenons disciples-missionnaires. N’est-ce pas un appel merveilleux ? Prions pour nos missions. Notre Père.