#264 « Faut-il demander à Dieu ?  »

Nous poursuivons notre parcours sur la prière, moyen indispensable et nécessaire à la vie spirituelle du chrétien. Le Pape François a demandé que la prière soit le cœur de nos vies en cette année 2024 afin de nous préparer au grand jubilé romain de 2025. La prière est un « simple regard jeté vers le Ciel » dit sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. Elle prend des formes bien diverses dans la Tradition catholique. Je voudrais vous entretenir aujourd’hui de la prière de demande. Faut-il demander ? Faut-il déranger Dieu avec nos demandes ? Est-ce même nécessaire puisque Dieu connaît toutes choses par avance ? N’est-ce pas égoïste de demander quand d’autres personnes peinent tellement plus que moi ? Dieu n’a-t-il pas plus urgent à faire que de s’occuper de mon problème ?

Le catéchisme de l’Église catholique aborde ce thème dans sa quatrième partie « la prière dans la vie chrétienne » et propose un commentaire sur la prière de demande (Voir CEC 2629 et suivants). Le catéchisme met en valeur un aspect positif de cette demande puisqu’elle manifeste notre conscience de la présence de Dieu et qu’elle est un retour vers lui. En effet, nous le savons, notamment lorsque la vie nous semble douce, nous pouvons nous détourner de Dieu et l’oublier. Nous nous rappelons du Seigneur face à l’adversité ou à une difficulté et nous nous adressons à lui, tel le lépreux rencontré par Jésus « Seigneur, si tu le veux, tu peux me purifier » (Lc 5,12).

Faut-il demander à Dieu ? S’il s’agit de demander des « choses », nous pouvons nous interroger. Entre l’adolescent qui demande à Dieu un smartphone et la maman éplorée dans sa misère qui demande à Dieu du riz pour nourrir ses enfants, il y a un grand fossé. Jésus a fait entrer l’humanité dans une Espérance nouvelle. La requête la plus importante concerne notre libération du péché en vue du salut. Le publicain, debout au fond de la synagogue qui dit à Dieu « aie pitié du pécheur que je suis » (Lc 18,13) demande l’essentiel. Il se voit lié par le mal qu’il fait et simultanément il dit sa confiance. Jésus dira à ses apôtres à son sujet : « quand ce dernier redescendit dans sa maison, c’est lui qui était devenu un homme juste » (v. 14). Demander avec humilité fait faire un pas vers la sainteté et demander l’humilité est une preuve de maturité spirituelle.

Dieu connaît nos cœurs et nos besoins. Il nous aime et désire nous guider vers Lui. Il nous rejoint dans le concret de nos vies et oriente nos attentes. Ainsi Jésus précise : « Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est aux cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui les lui demandent ! (Mt 7,11) ». Jésus encourage le croyant en orientant sa demande vers l’essentiel : « combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! (Lc 11,13) ». Dieu ne peut refuser à ses enfants son Esprit dont Jésus a annoncé et promis qu’il l’enverrait. Puisque l’Esprit divin c’est l’Amour même qui circule entre le Père éternel et son Fils au sein de la divinité, l’Esprit refusera-t-il le soutien espéré au fidèle croyant ?

Dans l’Évangile, Jésus insiste en affirmant que nous n’avons encore rien demandé. « Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira » (Mt 7,7). Lorsque notre prière est centrée sur l’avènement du Royaume de Dieu et le désir que nous avons d’y parvenir, comment Dieu serait-il insensible ? Certes, il nous laisse libre mais, tel un père, il nous écoute. « La vérité nous rendra libres » a affirmé Jésus. Si votre demande est vraie et légitime, si elle est en vue de la sainteté, Dieu va y répondre. Jésus accueille toujours les demandes qui sont des cris ou des supplications. Il entend celui qui souffre et s’approche de lui pour marcher à ses côtés. Dans ces cas, il n’est pas assuré que les conditions de vie et de travail du pauvre exploité par l’homme mauvais changent mais, en priant Jésus, cet homme expérimente la sollicitude divine qui accompagne ses efforts. Il n’est pas seul dans l’adversité, Jésus marche à ses côtés.

Parfois, Jésus intervient sans que les personnes n’aient exprimé leur demande. Rappelons le bel épisode de la femme hémorroïsse, très touchante. Elle a un flux de sang depuis douze ans, ce qui cause des douleurs et la rend impure pour participer au culte. Elle ne demande pas, elle ne veut pas importuner Jésus, mais seulement elle veut le toucher car elle espère ainsi qu’elle sera guérie. Plus qu’un espoir, elle croit qu’elle sera guérie. Le toucher seulement sera sa demande, tel un cri silencieux. Quelle audace dans l’humilité ! Elle croit fermement que si elle peut toucher le maître, sa vie changera. Elle ne désire que poser ce geste simple, mais si touchant dans sa foi en la puissance du Christ. Quand elle touche le manteau de Jésus, ce dernier expérimente qu’une force est sortie de lui, que quelqu’un l’a touché, ce que les apôtres confirment : « Tu vois bien la foule qui t’écrase, et tu demandes : “Qui m’a touché ?” » (Mc 5,31). Jésus voit la femme et la regarde, leurs regards se croisent, elle sait, elle a compris, son cœur entre dans la jubilation quand Jésus lui dit : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. Va en paix et sois guérie de ton mal (Mc 5,34) ».

Cependant dans les évangiles, il y a des demandes déplacées telle celle de la mère de Jacques et de Jean : « Ordonne que mes deux fils que voici siègent, l’un à ta droite et l’autre à ta gauche, dans ton Royaume. » (Mt 20,21). Cette demande suscite l’ire des autres apôtres, elle est malvenue et elle crée la confusion et la désunion. Jésus en retour leur dit : « Vous ne savez pas ce que vous demandez. Pouvez-vous boire la coupe que je vais boire ? (Mt 20,22) » Oh, ils la boiront en leur temps, par le martyre et ils siègeront dans le Royaume, mais non sans souffrance.

Ce jour, interrogeons-nous. Que demandons-nous ? Quelle est notre confiance en Jésus ? Quand nous le sollicitons pour nous-mêmes, comment accueillons-nous ses appels et son exigence qui dit « convertissez-vous ! » ? Nos prières de demande sont-elles orientées vers l’essentiel ? Pensons au jeune roi Salomon. Son père David avait vaincu ses ennemis par des guerres nombreuses, il avait préparé le règne de son jeune fils, l’avait installé sur son trône. « Aussi, cette nuit-là, Dieu apparut à Salomon et lui dit : « Demande ce que je dois te donner » (1Chr 1,7) ». Et Salomon de répondre avec humilité « Maintenant, Seigneur, donne-moi sagesse et connaissance, pour que je sache comment me comporter à la tête de ce peuple. »(1Chr 1,11)

Concluons en reconnaissant que la prière de demande est une énigme. Beaucoup de personnes se sont adressées à Dieu dans la confiance en la Parole qui invitait à demander. Ils n’ont pas été exaucés. C’est une expérience difficile, voire cruelle d’expérimenter que nous n’obtenons pas ! Mais le temps de Dieu n’est pas le nôtre. Possiblement Dieu a préparé un meilleur chemin de vie que celui que nous avions envisagé. Dieu attend le moment favorable pour répondre à notre demande et y apporter une réponse, sa réponse, certes improbable mais qui sera bénéfique pour notre avenir spirituel et notre espérance. Saurons-nous faire comme les hébreux dans la fournaise qui répondent au roi Nabuchodonosor : « Si notre Dieu, que nous servons, peut nous délivrer, il nous délivrera de la fournaise de feu ardent et de ta main, ô roi. Et même s’il ne le fait pas, sois-en bien sûr, ô roi : nous ne servirons pas tes dieux, nous n’adorerons pas la statue d’or que tu as érigée » (Dn 3,17-18) ? Le chemin de la foi est de garder notre confiance puisque Jésus a promis de demeurer avec nous chaque jour jusqu’à la fin. Oui, le Christ est glorifié par nos demandes en son nom. Jésus d’ailleurs, n’a-t-il pas fait ce reproche « Jusqu’à présent vous n’avez rien demandé en mon nom ; demandez, et vous recevrez : ainsi votre joie sera parfaite. (Jn 16,24) » ?

Pour avancer dans la prière et notre vie spirituelle alors que nous entrerons bientôt en carême, vivons l’eucharistie avec zèle. En priant le Notre Père, nous formulons plusieurs demandes importantes, dont celle-ci : « Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour » (Mt 6,11). Par l’eucharistie reçue en communion, Dieu répond à notre demande en nous donnant le corps de son Fils à manger afin d’être transformé et de devenir porteur de sa gloire. Je vous invite à méditer sur votre façon concrète de le recevoir, de l’adorer en le recevant, de l’exprimer par votre position physique et votre geste, de prendre le temps d’une action de grâce silencieuse après la communion ou après la messe, de vous laisser transformer en le sachant présent en vous.

Prions maintenant, et je propose en avant-première une prière mariale que nous pourrons utiliser pour le jubilé des 1 000 ans de la crypte. Je serai heureux d’avoir vous retours sur cette prière.

Notre-Dame de Chartres,
Souveraine et tendre mère, je m’incline devant vous avec respect et confiance.
Répandez votre amour sur tous ceux qui vous prient
et présentez leurs intentions à Jésus votre fils.
Obtenez-nous les grâces (…) que nous vous demandons.
Consolez ceux qui pleurent, convertissez les pécheurs,
préservez les familles, protégez les enfants et les personnes isolées,
soutenez l’Église, donnez-nous des prêtres et fortifiez-les.
Apportez la Paix dans le monde et dans le cœur de chacun.
De votre crypte, Notre-Dame de Sous-Terre, soyez la médiatrice de toutes les grâces !
De votre trône, Notre-Dame du Pilier, soyez la dispensatrice des trésors célestes !
Ô Vierge Immaculée, mère de Dieu et mère des hommes,
soyez ma mère pour ma vie en ce monde et pour l’éternité.
Je me donne à vous, accueillez-moi en vous, pour que,
enfanté par vous, je ressemble à Jésus pour toujours. Amen.

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Votre intention sera confiée à la prière des sœurs de Saint-Paul de Chartres.