#234 «Viens, Esprit Saint, libérateur, sur notre société déboussolée !»

Le 3 juillet, nous avons fêté l’apôtre saint Thomas. Nous l’aimons pour son caractère entier et son enthousiasme à suivre le Christ en osant affirmer : « Allons-y, nous aussi, afin que nous mourions avec lui » (Jn 11, 16). Thomas exige de toucher les plaies de Jésus pour croire en sa résurrection et, en le voyant huit jour après, il se prosterne et dit « mon Seigneur et mon Dieu » (Jn 20, 28). Dans la lecture de la messe célébrée en son honneur, Paul affirme : « frères, vous n’êtes plus des étrangers ni des gens de passage, vous êtes concitoyens des saints, vous êtes membres de la famille de Dieu, car vous avez été intégrés dans la construction qui a pour fondations les Apôtres et les prophètes ; et la pierre angulaire, c’est le Christ Jésus lui-même. » (Eph 2, 19-20) Paul a une forte conscience que les baptisés sont membres du même corps, c’est-à-dire l’Église, et qu’ils bénéficient d’un même baptême en vue du salut éternel. Les fondations de ce corps sont les apôtres d’où vient le terme d’Église apostolique. De ceci découle le fait que nous sommes concitoyens des saints, définitivement unis en Christ par qui nous avons une vraie patrie, le Ciel. Le Christ est notre vie et notre lumière. Nous découvrons l’amour fou qui nous vaut un tel sauveur. Bientôt nous le verrons. Paul ajoute « En lui, toute la construction s’élève harmonieusement pour devenir un temple saint dans le Seigneur » (Eph 2, 21). Pour l’Église, il n’est pas d’autre fondement que le Christ. Si pour les juifs, le temple est le lieu du culte rendu à Dieu, ici il ne s’agit plus de l’espace physique mais de l’assemblée des disciples. Nous sommes le nouveau temple, l’Église. Malgré tant de persécutions et de vexations, malgré nos divisions internes et notre péché, l’Église grandit et accueille de nouveaux enfants. L’Esprit la conduit et la société civile n’est pas son modèle : elle est une société surnaturelle. Son harmonie vient de la force de l’Esprit qui la garde unie même si nous constatons combien la désunion, inspirée par le diable, est une tentation fréquente.

La vie en société a besoin d’harmonie, comme chacun d’entre nous. Les terribles émeutes que notre pays connaît sont un signal fort que notre société humaine est en échec. La violence des affrontements en est le signe. Certes, nous lançons des satellites, nous fabriquons des robots médicaux fantastiques, notre science atteint un niveau magnifique et pourtant il y a un cancer dans notre société évoluée qui envoie des métastases mortifères. L’État injecte annuellement plus de 700 milliards d’euros en aides sociales mais beaucoup expriment leur désarroi et leur sentiment d’être exclus d’un bonheur auquel ils aspirent, sans cependant toujours être capable de l’identifier. Vols et violences, incendies et pillages, nous sommes revenus à des heures sombres que notre pays a déjà connues. Éteindre le feu est une mission ardue et nous remercions les pompiers qui y engagent leur propre vie comme ce jeune pompier de 24 ans décédé après une intervention. Qu’il est difficile d’arrêter la folie ! La police donne tout ce qu’elle peut pour y arriver au prix de centaines de blessés. Les éducateurs peinent à convaincre les jeunes des cités de revenir à la paix et au dialogue. Saint Paul demande de « fuir le mal avec horreur » mais qu’est-ce que le mal pour ces jeunes ?

Quelle est la racine profonde du mal-être, la cause de cette folie ? Caïn a tué Abel par jalousie. Ils étaient pourtant frères de sang. Mais comment discerner le bien du mal dans une société qui légalise l’avortement ? L’être humain est sensible, fragile et blessé. Nous lisons dans le livre de la Genèse comment le péché est entré dans la vie de nos premiers parents et a introduit la division, la suspicion, l’accusation, la peur de Dieu. Le récit de la Genèse est un mythe à ne pas prendre littéralement, mais il dévoile le projet initial voulu par Dieu qui est d’offrir aux êtres humains une profonde communion avec Lui et entre eux. Ce projet s’est brisé quand les humains mirent la main sur l’arbre de la connaissance du bien et du mal, pensant être maîtres de la nature, devenant esclaves de leurs envies et soumis à la violence mutuelle, voulant faire de leurs lois humaines un absolu hors de toute sagesse divine. Nous voyons cette violence dans la cour de récréation, entre voisins, même au sein des familles. La peur suscite la violence. La loi naturelle, les dix commandements, la morale du bien et du bonheur ne sont plus enseignées comme la base commune du vivre ensemble. Si les parents et les éducateurs démissionnent devant l’exigence d’éduquer chaque enfant à discerner le bien, à maîtriser ses pulsions et ses émotions, à accepter la contradiction et la frustration, à savoir se priver dans ses désirs débordants, alors nous en faisons des jeunes perdus. Il y a une vingtaine d’années, un prêtre directeur d’un camp d’été s’était entendu dire par un jeune marginal « vous ne dites rien devant nos bêtises, vous ne nous aimez pas ! » Ce fut pour ce prêtre un choc salutaire.

Jésus dit que l’on reconnaît l’arbre à ses fruits, car un arbre bon donne de bons fruits mais un arbre pourri donne des fruits pourris. Les émeutes de ces jours sont les fruits pourris de notre société. La France, notre beau pays, n’est-elle pas imbue d’elle-même ? Nous ne sommes plus un modèle pour les droits de l’homme. Pour ces jeunes, souvent de la troisième génération de la migration d’Afrique du Nord, la greffe n’a pas pris, ils cherchent d’autres repères et des raisons de vivre, certains hors des valeurs de la République qui ne leur disent rien. Ils pensent que tels les révolutionnaires, ils doivent détruire pour bâtir un monde nouveau ! Or nous le savons car l’histoire nous l’enseigne : cela n’engendre que drames et souffrances.

Nous aurons des décennies difficiles car l’avenir est à réfléchir et à repenser. Il faudra du temps pour être à l’écoute les uns des autres, il faudra des personnes qui se dévoueront pour la rencontre de cette jeunesse, des politiques qui n’arriveront pas avec des solutions toutes faites voire insensées, des personnes qui auront du cœur pour entendre battre celui d’autrui. Il faudra une source de sagesse, une source commune pour y boire une eau vive qui donne envie d’espérer et non de casser. Cela passe en premier par l’éducation donnée par les parents qu’il faut aider plus qu’accabler, par les éducateurs au sein des quartiers et par les enseignants. Un long chemin est devant nous pour entreprendre cette longue marche comme le peuple hébreu dans le désert du Sinaï durant quarante années. Lui suivait la nuée lumineuse la nuit et sombre le jour pour être guidé. Cette nuée était la présence de Dieu. Mais aura-t-on le temps de penser une nouvelle société quand les politiques doivent aller vite pour satisfaire un électorat volage ? Certains préféreront la guerre. Nos pays sont tellement armés que cette tentation est un risque réel et terrible.

Dans ce passage déjà cité de sa lettre aux Éphésiens, saint Paul relève que c’est « en Christ » que la construction s’élève harmonieusement. Or « en qui » notre société va-t-elle trouver espoir ? Il faut des prophètes au service des autres, et non des gourous ou des politiciens orgueilleux. Il faut des éducateurs comme Don Bosco ou le père Daniel Brottier, des hommes de cœur comme saint Vincent de Paul. Le Christ est notre lumière et sa parole est vie. L’Église a porté depuis deux mille ans la parole de vie aux quatre coins du monde. Elle a éduqué la jeunesse et a soigné les malades en tous lieux. Tant de saints et saintes ont donné leur vie pour ce but, ont été martyrs et le sont encore aujourd’hui, par exemple au Nigéria où des milliers des chrétiens sont assassinés chaque année par des islamistes. L’Église catholique qui œuvre dans ces pays est un phare dans la nuit.

Face au mal qui ressurgit en France régulièrement, l’Église qui est en France doit se réveiller. Saint Jean-Paul II nous a posé cette question au Bourget en 1980 : « France, qu’as-tu fait de ton baptême ? ». Chrétiens de France, vous êtes une majorité d’hommes et de femmes baptisés qui avez reçu le merveilleux don du salut par Jésus-Christ. Où êtes-vous ? Dans nos campagnes, nous vous voyons aux funérailles mais après vous êtes absents. Dans nos villes, vous courrez après le temps, faisant mille choses pas toujours nécessaires, mais pourquoi ne priez-vous pas quotidiennement ? Nous sommes chacun devenu prophète par notre baptême, c’est-à-dire porteur d’une vocation pour annoncer la Parole de Dieu dans notre société contemporaine. Je vous exhorte à retrouver le chemin de l’Église car nous avons reçu du Christ un trésor et la clé pour un monde harmonieux. Pour cela, nous avons besoin de chacun, nous devons courageusement agir ensemble pour transmettre l’Évangile de la joie et de paix. Par Jésus-Christ, notre société découvrira les voies de la sagesse et de l’unité. En vivant dans la lumière du Saint Esprit, au service des petits et des pauvres, nous serons témoins de lui, ensemble, joyeusement.

Prions souvent le Saint Esprit comme on s’adresse à un ami fidèle afin d’être éclairés.

Viens, Esprit Saint, libérateur,
Viens Esprit Saint, notre Seigneur,
Viens Esprit Saint, ô défenseur,
Viens, viens en nos cœurs.

  1. Toi qui procèdes du Père et du Fils,
    Esprit de vérité, enseigne-nous,
    Esprit d’amour, viens nous enflammer !
  2. Source d’eau vive, guéris notre corps,
    O souffle du Très-Haut, pacifie-nous,
    Brasier ardent, viens nous consumer !
  3. Toi, Esprit Saint, purifie notre cœur,
    Toi, l’Esprit d’allégresse, exulte en nous,
    Esprit de vie, transfigure-nous !
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