#226 «Jésus dit à Marie-Madeleine « je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu ». (Jn 20, 17)»

Hier, nous fêtions l’Ascension. Sur ce dogme, l’Écriture sainte nous dit « Jésus leur répondit : Il ne vous appartient pas de connaître les temps et les moments que le Père a fixés de sa propre autorité. Mais vous allez recevoir une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. Après ces paroles, tandis que les Apôtres le regardaient, il s’éleva, et une nuée vint le soustraire à leurs yeux. » (Act 1, 7-9) La nuée est le signe de la présence de Dieu, c’est elle qui précédait le peuple hébreu dans le désert pour le guider, c’est elle qui couvrit Marie de son ombre quand l’Esprit descendit en elle. Maintenant, au terme de la vie publique de Jésus, le Verbe divin venu par le sein maternel de Marie retourne auprès du Père éternel de qui il est venu. Rappelons-nous que Jésus dans la grande prière sacerdotale qu’il exprime dans les heures qui précèdent son arrestation et sa passion disait à Dieu son Père : « Moi, je t’ai glorifié sur la terre en accomplissant l’œuvre que tu m’avais donnée à faire. Et maintenant, glorifie-moi auprès de toi, Père, de la gloire que j’avais auprès de toi avant que le monde existe. » (Jn 17, 4-5) Le mot gloire est fort et désigne la manifestation de la divinité, de la toute-puissance et de la sainteté divine. Au sein de la Trinité, les trois personnes la partagent. Or le Fils, par son incarnation, s’est abaissé en prenant la condition humaine (Cf. Ph 2) et humblement il demande à Dieu le Père de retrouver pleinement la gloire qu’il partage éternellement avec Lui.

Mais comment comprendre l’ascension du corps humain de Jésus ? Comment notre humanité assumée par Jésus lors de son incarnation est-elle dorénavant présente en Dieu ? Voici un mystère des plus étonnants. Il exprime que le corps humain ne peut pas être considéré comme une simple enveloppe matérielle jetable. Notre corps est comme un média pour exprimer notre amour. Sa nature charnelle autorise la relation envers les autres : nous exprimons notre amour grâce à notre bouche par laquelle nous nous parlons, nous nous regardons par nos yeux, nous nous écoutons grâce à nos oreilles, nous pouvons approcher l’autre par des gestes puisque nous avons des mains, nous pouvons recevoir l’odeur de l’être aimé grâce à notre odorat. Le corps est si précieux. Dans notre société, il peut être adulé comme corrompu voire modifié. Or ce corps nous est singulier, il est un don personnel, aucun corps n’est identique, chaque ADN est unique. En philosophie, ne dit-on pas « nous sommes un corps » ? Tous ensemble, disciples de Jésus, nous formons un seul corps, l’Église, le corps mystique du Christ, à la fois visible et invisible car nous communions à la divinité de Jésus. Par son Ascension, Jésus ne se désolidarise pas de l’humanité qu’il a assumée en tant que Verbe divin, en tant que Fils unique du Père. Par lui, notre humanité est éternellement unie à Dieu et présente en Dieu.

Jésus est élevé au Ciel et cependant il demeure présent avec nous par son Esprit puisqu’il l’a promis, voici encore une part du mystère absolument étonnante : « vous allez recevoir une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous. » (Act 1,8) C’est la promesse tellement merveilleuse faite à chacun de nous. En présence de l’Esprit de Dieu, nous ne demeurons pas esseulés sur Terre car nous sommes accompagnés par lui qui nous guide et nous inspire. Ce sera lors de la fête de la Pentecôte que nous ferons mémoire de la communication des dons faite aux apôtres et que nous demanderons d’être renouvelés par l’effusion du saint Esprit pour servir Dieu et aimer les autres. En effet, dans la liturgie ecclésiale, nous vivons de manière renouvelée le même événement ancien, l’Esprit permettant que tous les disciples soient convertis plus encore en vue de leur union à Jésus et afin d’être envoyés en mission. Ce feu qui descendit sur chaque apôtre sous forme de langues brillantes, nous demandons qu’il nous illumine en réponse à l’attente de Jésus : « il me tarde qu’il soit déjà allumé » (Lc 12,50). Si le feu détruit, le feu purifie surtout l’or, le feu transforme les aliments pour les rendre digestes, le feu réchauffe là où le froid donne la mort. Ce feu, Jésus l’a montré à sainte Marguerite-Marie Allacoque, sœur visitandine, en lui montrant son cœur enflammé et en lui disant « Voilà ce Cœur qui a tant aimé les hommes, qu’il n’a rien épargné jusqu’à s’épuiser et se consommer pour leur témoigner son amour. »

Cet amour brûlant, notre société n’en a-t-elle pas un besoin urgent ? Les tentations de manipuler la vie, la loi sur la fin de vie qui veut ouvrir la possibilité du suicide assisté et de l’euthanasie, le suicide si fréquent particulièrement chez les jeunes mais aussi les retraités, la mise à mort des enfants dans le sein maternel, la violence croissante dans les conflits domestiques, tout cela ne dit-il pas le désarroi d’une humanité perdue qui compense son mal-être par la consommation et l’étourdissement, par les rêves d’argent facile et par des relations interpersonnelles éphémères, par la consommation de drogues. Comment serons-nous des témoins du don de Dieu, de la présence et de la force du Saint Esprit ? Entre l’Ascension et la Pentecôte, nous vivons la première neuvaine, celle que vécurent les disciples au Cénacle de Jérusalem dans l’attente de la promesse de Jésus.

Aussi, j’aimerais vous parler des fraternités de maison que je mentionnais dans mon dernier message en les appelant des « foyers de feu ». Nous en avions déjà proposées durant l’Avent ou le carême avant la Covid. Il s’agissait de s’organiser localement et de se retrouver en équipe à domicile pour lire ensemble les évangiles, méditer la Parole de Dieu et prier les uns pour les autres. Ces fraternités prennent des noms divers suivant les diocèses : maisonnées, fraternités, équipes, groupes de partage, etc. Elles sont précieuses comme lieu d’échanges et de rencontre, comme lieu d’enrichissement mutuel, comme lieu de parole et de confiance, comme lieu d’intercession donnant à chaque membre la paix et la joie de s’y retrouver entre amis chrétiens. Dans nos villages ne seront-elles pas la réponse à l’isolement spirituel afin que des chrétiens se regroupent autour de la Bible ? Ce ne sera pas une organisation d’experts, mais le regroupement de chrétiens aimant Dieu et souhaitant se dire les merveilles que l’Esprit réalise. Si l’on prend le modèle de la Pentecôte, première fraternité en attente du Saint Esprit dans le partage de ce que Jésus a réalisé durant sa vie terrestre, nous pourrons les nommer « foyer de feu ». Le foyer est l’âtre autour duquel une fratrie se retrouve et le feu est le signe de la présence du Saint Esprit. Ces foyers de feu pourront accueillir jusqu’à dix ou douze personnes, pratiquantes ou non, juste désireuses de lire et de partager la parole de Dieu. Aucun chef ou leader n’est nécessaire une fois que quelques-uns, de bonne volonté, se retrouvent. À tour de rôle, on sera accueilli chez l’un ou l’autre membre du foyer de feu, idéalement tous les quinze jours. Ce serait mieux de se voir réellement mais on pourra se retrouver parfois en visioconférence pour faciliter la participation des plus éloignés. Simplicité, beauté, communion, accueil et écoute seront les maîtres mots de cette rencontre. À la fin des soirées, chacun repartira avec dans la mémoire et le cœur les membres plus souffrants pour qui prier les uns pour les autres. Un groupe WhatsApp pourrait être utile pour se donner des paroles de soutien de temps à autre.

Cela doit jaillir du désir des fidèles du Christ qui comprennent l’urgence de vivre authentiquement la fraternité à l’écoute de la parole de Dieu. Point n’est donc besoin d’attendre pour commencer. Si quelques personnes s’associent, elles pourront commencer en accueillant des voisins afin de lire un évangile chapitre après chapitre. Lors d’une messe, le curé les bénira et les enverra comme cellule vivante au sein du village où les membres résident. Ce serait bien que ceux-ci habitent proches les uns des autres pour être au contact des personnes de leur commune, pour aller ensemble dans leur église, l’ouvrir, la nettoyer et y prier. L’avenir de l’Église passera par ces cœurs brûlants au contact de l’Écriture et à l’écoute du Saint Esprit, tout en prenant soin les uns des autres, ce qui implique une décision personnelle de s’engager dans la foi au Christ ressuscité.

L’évangile de Jean nous redonnait les mots de Jésus adressés à l’apôtre Thomas : « je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne va vers le Père sans passer par moi ». (Jn 14, 6) Dans l’attente de la Pentecôte, mettons-nous à son écoute et prions-le :

Seigneur Jésus, envoie ton Esprit d’amour sur nos vies et celles de tous ceux qui sont affligés par la peine, le deuil ou la souffrance. Sois notre lumière. Que ton Esprit accompagne nos pas et nos choix. Nous nous remettons avec toi entre les mains du Père en priant :

Notre Père…

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