#346 « « Ce que tu espères avec foi, le Ciel te le prépare avec amour » (Léon XIV, prédication). »

C’est le mois de septembre. Ces mois d’été passent vite, avec des moments magnifiques comme la session à Paray-le-Monial parmi des personnes en situation de handicap, et le pèlerinage diocésain à Lourdes avec l’Hospitalité. Les écoles ont rouvert. Les nouveaux curés découvrent leur paroisse et les fidèles leur nouveau pasteur. Les enfants sont attendus au catéchisme. Dans les paroisses, nous pensons aux recommençants, aux néophytes baptisés à Pâques, à ceux qui viennent vers Jésus-Christ. Sommes-nous prêts à les accueillir, à ouvrir notre porte, à les recevoir comme des frères ? Ils ont ressenti que leur cœur désire cet amour divin qui bouscule la vie, qui communique la joie, qui est miséricordieux pour le pécheur. Saint Augustin que notre bien-aimé pape Léon cite souvent, reconnaît au terme d’une longue quête de la vérité que « son cœur est sans repos tant qu’il ne repose en lui », ce « lui » se nomme Jésus-Christ, il n’y a point d’autre sauveur et dorénavant sa vie sera celle du pasteur infatigable qui nous a laissé une œuvre littéraire immense. Si l’homme est un être en relation sociale pour exister et déployer ses talents, il est bon de découvrir ce Dieu qui vient vers nous pour créer cette relation d’amitié ouverte à la vie divine. Des jeunes gens viennent en ce moment demander des réponses, veulent participer aux messes, ils n’ont pas été initié à la vie chrétienne qui pourtant les attire. Ce désir est un grand mystère et nous l’accueillons en tremblant, car quel est ce Dieu qui frappe à la porte et propose sa proximité ? La foi a tant à dire à nos contemporains souvent désespérés par les nouvelles du monde. Moi-même, prêtre du Christ, quelle émotion ne m’étreint quand, saisissant entre mes doigts l’hostie de pain azyme, je prononce les paroles de Jésus « prenez et mangez-en tous, car ceci est mon corps livré pour vous » (Prière eucharistique de la messe). Alors ce que je dis advient par la puissance du Saint Esprit, le Corps du Christ est entre mes mains, offert et livré pour le salut de ceux et celles qui vont communier. C’est alors la rencontre indicible, bouleversante, jamais achevée, proche avec Dieu si proche en Jésus-Christ. Dieu a inscrit dans notre cœur le désir de le recevoir et le voici donné. Des paroles de la consécration, chaque prêtre doit les dire avec ce sentiment bouleversant qu’il accomplit l’œuvre la plus extraordinaire, celle qui relie le Ciel et la Terre.

La foi chrétienne enseigne que Dieu nous parle et se communique par la Parole et les sacrements. Là aussi le mystère se dévoile doucement à ceux qui se mettent à son écoute, qui prennent sa Parole au sérieux, s’en faisant les lecteurs passionnés. Elle se dévoile au-delà des mots parfois obscurs à notre entendement, pour se faire chair et présence. Saint Paul dit que la Parole est « non pas une parole d’hommes, mais la parole de Dieu qui est à l’œuvre en vous, les croyants » (1Th 2,13). Elle révèle la vérité de notre vie, elle dénonce le mal, elle encourage nos volontés à ne pas aller vers des chemins mondains perdus, elle éblouit par sa poésie. Quelle beauté s’y cache, inspirée par le Saint Esprit à ceux qui écrivaient sur du parchemin avec une plume en roseau ? Ils prenaient le temps de trouver les mots adaptés, ils vivaient sans montre ni smartphone, uniquement concentrés sur cet ouvrage destiné aux générations des siècles à venir. Comment ne pas les remercier d’y avoir fatigué leurs yeux quand ils œuvraient à la lumière d’une lampe à huile ? Pourtant la Parole révèle aussi nos manques et le mal qui nous habite, Jésus visage de l’amour pour les petits et les pauvres n’hésite pas un instant pour dénoncer les pharisiens qui ont l’apparence du juste mais qui sont, en réalité, remplis par le mal et l’hypocrisie (Cf. Mt 23,28). Ses disciples doivent choisir la conversion, saint Jean le Baptiste les y appelait fermement. À nous d’entendre son appel, puisque la foi est contagieuse par la sainteté des fidèles qui osent vivre en contradiction à l’esprit du monde et à ses conformismes idéologiques. « Mon Royaume n’est pas de ce monde » dit Jésus (Jn 18,36) et ses frères et sœurs attendent le monde à venir, nouveau et paisible.

Le message de la foi est celui de la Croix car « le disciple n’est point plus grand que son maître » (Lc 6,40). Or qui aime en parler, qui désire vraiment l’embrasser et la porter ? Elle est synonyme de peine et de souffrance. Or n’avons-nous pas déjà notre dose d’épreuve ? Sur l’île d’Yeu, face à l’océan Atlantique, une haute croix est dressée dans une grande barque en ciment, posée sur les rochers en mémoire de tous les marins des thoniers qui périrent en mer. Elle rappelle que Jésus-Christ a offert sa vie sur cette croix pour que chacun soit sauvé et vive en sa présence éternellement. Elle est un signe provoquant et bouleversant pour qui entre dans le mystère du salut et de l’amour rédempteur de Dieu. Il nous a sauvés par amour. Ces hommes courageux, et leurs épouses, mettaient leur foi en Dieu et en Notre-Dame pour les protéger des périls. Nous osons appeler bienheureux ceux qui disparurent dans les flots tumultueux de la mer, car ils sont allés rencontrer Dieu face à face. Des saints l’avaient compris. Saint Louis-Marie Grignon de Montfort avait son crucifix en main au cours des missions qu’il effectuait en Vendée et en Bretagne. Sainte Rita, merveilleuse femme, épouse et mère, veuve devenue religieuse, contemplait cette croix durant ses adorations car elle y voyait tout l’évangile. La Croix n’est pas juste un symbole chrétien, elle est un arbre de vie, d’où coule l’eau et le sang du côté transpercé de Jésus, elle est une présence vivante qui transforme la souffrance en chemin de résurrection.

Alors la joie authentique peut advenir et la parole de l’apôtre Paul se réaliser « soyez toujours dans la joie du Seigneur » (Ph 4,4). C’est une joie surprenante et paradoxale, même dans les épreuves, une joie qui éclaire la vie quotidienne. Elle est l’œuvre du Saint Esprit, elle est « la joie du salut » (Ps 50,14) qu’annonce le psalmiste mille ans avant que naisse Jésus. La joie devient la couleur magnifique de notre vêtement reçu au baptême, elle grandit par la louange et par la charité échangée. À Lourdes, en servant les personnes fragiles, les hospitaliers expérimentent cette belle joie en leur cœur, elle illumine leur visage d’un beau sourire, leurs yeux brillent de ce bonheur. Charité et joie deviennent deux formes de l’action divine dans la vie du chrétien, elles déploient en lui des ressentis profonds, elles soutiennent le quotidien et stimulent le courage si nécessaire pour affronter le chemin de la vie. Dans l’Ancienne alliance, l’Esprit soufflait déjà et il annonçait la venue du Messie en préparant son œuvre. Nous, disciples de Jésus, devons entretenir cette joie par notre louange et notre prière fidèle. Nous la communiquons par notre charité active comme les hospitaliers à Lourdes. Ce don de soi a décuplé la joie échangée. Chacun est revenu en reconnaissant avoir reçu plus que donné. Ce fut une multiplication de la grâce permise par la communion vécue ensemble.

Dans notre société si active, performante, productrice et efficiente, ce don gratuit de la joie est étrangement paradoxal. Nous, chrétiens, ne recherchons pas l’efficacité mais la fécondité. Seul l’amour accomplit en nous la vie espérée et partagée. Il s’agit d’apprendre à aimer, à bénir, à soutenir, à donner. Le livre de Tobie donne une belle règle de bonheur « ce que tu n’aimes pas, ne le fais à personne » (Tb 4,15). Jésus dira pareillement « tout ce que vous voudriez que les autres fassent pour vous, faites-le pour eux » (Mt 7,12). Que cette société serait bienheureuse et harmonieuse si, tous, nous empruntions cette voie, car joie et charité sont les deux faces d’une même pièce de grande valeur, plus que l’or pur et elles causent la paix. L’homme qui le comprend et s’en revêt cultive sa ressemblance avec Dieu et devient malgré lui le témoin de l’évangile. Il comprend le don de Dieu et vit la vraie humilité qui se reçoit par grâce. Dans sa vie, Dieu est son créateur et lui est une simple créature mais une créature bénie et heureuse d’être instruite des voies de la sagesse.

Ces jours à venir, empruntons volontiers le chemin de la sainteté, demeurons sereins car le Seigneur est là. Le temps de l’été est le temps des vacances et il est connu que nos bonnes habitudes spirituelles sont bouleversées. Maintenant c’est le moment de se ressaisir de notre appel, de mettre dans l’agenda quotidien nos rendez-vous de prière et de lectures spirituelles en nous montrant généreux et raisonnables pour tenir dans le temps, au long des mois. Notre fidélité à ces rendez-vous sera le signe de l’authenticité de notre foi. La conversion n’est possible en vérité que pour celui qui s’unit à Jésus-Christ afin qu’il fasse œuvre de transformation en nous. Jour après jour, laissons-nous enseigner par la Parole de vie, entrons dans la sagesse qui y est cachée et nous y découvrirons notre liberté. Soyons des passionnés de l’évangile et de tous les écrits bibliques car ils sont une source inépuisable. Que nos enfants en soient nourris par le partage de ces textes merveilleux. L’Église grandit par la puissance de l’évangile accueilli et vécu. C’est une responsabilité confiée aux fidèles expérimentés afin que les hommes et les femmes qui frappent à la porte de nos églises trouvent un accueil et soient enseignés. « Priez sans cesse » dit Paul (1Th 5,7). En effet, prions pour être disponible intérieurement pour cet accueil de l’autre qui a vocation à devenir notre frère et notre sœur. Aucun ne doit être ignoré. Chantons la louange du Seigneur et célébrons les sacrements avec soin et profondeur, ainsi le don de Dieu sera reconnu et accueilli.

En ces jours d’un avenir incertain pour la France, prions pour nos dirigeants, et demandons qu’ils sachent se tourner humblement vers ce Dieu d’amour qui nous est révélé afin que tous œuvrent pour le bien commun. En guise de méditation, voici quelques paroles du pape Léon XIV :

« Il n’y a pas de nuit assez noire pour étouffer une âme qui prie.
Ce que tu vis en secret, Dieu le voit.
Ce que tu pleures en silence, Dieu le recueille.
Et ce que tu espères avec foi, le Ciel te le prépare avec amour.
Ne laisse pas le bruit du monde étouffer la voix douce de l’Espérance.
Même si tout semble figé, la Grâce continue d’agir, en profondeur, dans l’invisible.
Chaque larme versée dans la confiance devient une semence d’éternité.
Reste fidèle. Même dans l’obscurité.
Car parfois, c’est dans le silence des nuits sans réponse
Que Dieu prépare les plus grandes délivrances. »

Notre Père.

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