#351 « Pourquoi Jésus accepte-t-il le baptême de Jean le Baptiste (Marc 1) ? »

Chers amis, nous entamons une lecture presque continue de l’Évangile selon saint Marc. Nous avons commencé à lire le premier chapitre qui présente Jean le Baptiste baptisant ses contemporains en vue de leur conversion. Dans beaucoup de religions, on trouve des rites d’ablutions ou de purification. Chez les chrétiens, l’entrée dans l’Église commence par le baptême et ce rituel est appelé un sacrement. Nous ne recherchons pas une purification du corps humain pour nous présenter propre devant Dieu. Un sacrement est un geste liturgique, appelé aussi signe, que le croyant reçoit comme un don spirituel en vue de son union avec Dieu. Selon les Saintes Écritures, c’est Jésus-Christ qui institue les sept sacrements de l’Église dont les trois premiers sont appelés sacrements de l’initiation : le baptême, la confirmation et l’eucharistie. Un sacrement transmet en vérité, c’est à dire réellement, ce qui est manifesté visiblement. Ainsi le baptême obtient le pardon de tous les péchés passés, en vue de la vie éternelle qui est promise au baptisé non en raison de mérites acquis, mais en raison d’une grâce ineffable, celle qui consiste à devenir enfant de Dieu. Le baptisé devient frère ou sœur de Jésus, sa vie est destinée à être sanctifiée en vue de partager dans l’au-delà la présence de Dieu avec les saints et les saintes. Le baptême révolutionne la vie, il est source de vie, il ouvre à un avenir nouveau, telle une nouvelle naissance.

Le baptême dont parle le commencement de l’Évangile selon saint Marc, donné par Jean le cousin de Jésus, n’a pas encore cette qualité sacramentelle. C’est un rituel qui exige une conversion, pour un changement de vie afin de suivre réellement les commandements de la Torah juive.

C’est alors que Jésus arrive et demande à être baptisé à son tour par Jean. Pourquoi est-ce si surprenant ? Car nous savons que Jésus est Dieu fait chair, que sa vie est semblable à celle des hommes à l’exception du péché. Dans sa situation, pourquoi aurait-il besoin du baptême de purification ? Jésus partage totalement la condition humaine, comme ces hommes qui font acte de pénitence. Mais lui fait un acte d’humilité puisqu’il est sans péché. Il embrasse leur vie. Il leur manifeste sa solidarité et certains disciples vont le voir de manière nouvelle.

Afin de comprendre, lisons les trois versets du baptême de Jésus dans cet Évangile (Mc 1,9-11) :

« En ces jours-là, Jésus vint de Nazareth, ville de Galilée, et il fut baptisé par Jean dans le Jourdain. Et aussitôt, en remontant de l’eau, il vit les cieux se déchirer et l’Esprit descendre sur lui comme une colombe. Il y eut une voix venant des cieux : “Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie”. »

Marc est très sobre. Son récit ressemble à une brève dans un journal local. Marc confirme que Jésus vivait habituellement à Nazareth, en Galilée. La Galilée est aussi appelée la terre des nations, car beaucoup la traversent, voire y font commerce. Comparée à Jérusalem, la grande ville située sur une haute montagne, Nazareth est un gros bourg campagnard, assez méprisable pour certains. Quant au Jourdain, si cette rivière demeure un petit cours d’eau, il est la source de vie pour une grande partie de l’agriculture au long de son cours qui descend inexorablement vers la Mer Morte bien en dessous du niveau de la mer. C’est la rivière qui délimite les terres orientales de la Terre promise. C’est là que le peuple traversa de nombreuses fois sous la conduite des patriarches et des prophètes tel Élie capable d’en arrêter le débit afin que tous passent à gué les pieds au sec. C’est dans le Jourdain que l’officier syrien Naaman, général de l’armée du roi d’Aram, qui souffrait de lèpre, alla se plonger sept fois obéissant au prophète Élisée afin d’être guéri de sa lèpre (2Rois 5,1-19) ; sa peau redevint « comme celle d’un petit enfant », il était guéri. Naaman alors reconnut que le Dieu d’Israël est le vrai Dieu et il s’engagea par une promesse définitive : « désormais, je ne veux plus offrir d’holocauste ni de sacrifice à d’autres dieux qu’au Seigneur » (2 R 5,17).

Quand Jésus est plongé dans les eaux du Jourdain, advient une manifestation glorieuse visible pour les témoins qui sont présents : les cieux se déchirent, et l’Esprit de Dieu descend, comme une colombe. L’expression comme une colombe signifie bien que l’apparition est surprenante, légère et céleste, elle rappelle la colombe portant dans son bec un rameau d’olivier quand les eaux du déluge refluèrent. Est-ce que ce fut un souffle, un bruissement léger, un mouvement insaisissable ? Sans doute tout ceci à la fois. Cette manifestation préparait les témoins du baptême à entendre une voix qui ne s’adressait pas qu’à Jésus mais à tous : « Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie. » Dieu était déjà appelé Père dans l’Ancienne Alliance mais ici il se manifeste comme tel par une parole claire. Ce qui est nouveau est donc l’autorité de Dieu Père qui désigne Jésus comme son propre Fils, lui disant combien il est le Fils bien-aimé, le premier destinataire de son amour divin. Il le confirme comme Fils, lui exprime sa confiance paternelle, et ajoute qu’en lui, il trouve sa joie. La joie divine, la joie qui ne peut être infinie qu’en Dieu, se trouve dans la vue de ce Fils divin et humain, qui accomplit le projet paternel en se soumettant à son plan en vue du salut de l’humanité.

Ce premier baptême n’est pas encore le nôtre. Cependant, passant par sa passion, sa mort et sa résurrection trois années plus tard, Jésus nous fait participer à cette œuvre rédemptrice et le baptême que nous recevons dorénavant est un passage par la mort et la résurrection de Jésus en vue de nous délivrer des funestes conséquences de notre péché : la mort définitive. On dit que Jésus en acceptant d’être immergé dans le Jourdain a sanctifié toutes les eaux du monde pour que les futurs croyants y soient sanctifiés à leur tour. Ne pensons pas que l’eau serait devenue magique, mais y être plongé au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, c’est-à-dire au nom de la Sainte Trinité qui est Dieu, nous purifie totalement, nous libère des conséquences terribles du péché des origines qui se transmet de génération en génération, et nous infuse la merveilleuse grâce divine qui nous fait prêtre, prophète et roi. Nous recevons alors ce que l’on appelle les vertus théologales : la foi, l’espérance et la charité. Nous ne sommes plus seuls comme jetés en pâture dans un monde insaisissable puisque nous sommes frères et sœurs de Jésus, rassemblés en une même famille qui se nomme l’Église. Une renaissance s’opère et elle nous place devant notre responsabilité afin de répondre à son Amour par notre amour, à son pardon par notre pardon, à sa générosité par notre générosité.

Pour ceux qui ont reçu le baptême, il nous appartient de vivre en cohérence avec le don qui fait de nous des fils de Dieu. Par cette cohérence, un témoignage s’opère puisqu’alors la vie du quotidien ne peut plus se contenter de rapports mondains et de projets simplement humains. Notre cœur désire tellement plus lorsqu’il a goûté au parfum d’éternité et qu’il entrevoit combien il est créé pour un amour qui dépasse les sentiments humains, si beaux soient-ils. Illuminés par la grâce du baptême, nous voulons vivre les bras ouverts vers les autres, prompts à donner notre témoignage d’une belle rencontre avec celui qui vient nous sortir de l’antre de la mort.

N’est-ce pas merveilleux de prendre conscience que la parole du Père éternel envers Jésus peut dorénavant nous être destinée : nous sommes devenus ses fils et ses filles par notre baptême et Dieu nous dit maintenant : « Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie. » Nous avons le bonheur d’une nouvelle filiation différente de notre filiation biologique et familiale et cependant puissante car en Dieu, cette filiation est objective et Dieu ne reprend pas ses dons. Par ce baptême, nous sommes devenus sien. Nous recevons une nouvelle identité. On pourrait refuser un tel honneur : nous connaissons nos pauvretés et nos péchés. Or Dieu ne nous considère jamais comme nous le faisons envers nous-même ou envers autrui. Nous parfois si durs envers nous-mêmes. Ici, il ne s’agit pas de penser ainsi, il faut nous laisser aimer, envelopper par l’amour divin, comme par les eaux baptismales quand nous y sommes plongés totalement. Être fils dans le Fils, voilà ce que communique encore le baptême reçu. Ce don peut s’oublier et le pape Jean-Paul II surprit des milliers de visiteurs lors de son discours au Bourget en 1981 quand il s’exclama « France, qu’as-tu fait de ton baptême ? » Celui-ci, en effet, n’est pas comme un diplôme acquis dans le passé mais il y a là une responsabilité et un appel à le vivre au quotidien sans faillir. Le pape François considérant cette nouvelle naissance en Christ parlait de vivre « dans l’étreinte infinie de Dieu ».

Prions pour vivre pleinement des grâces reçues à notre baptême. Regardons comment Jésus accepta le combat de la foi en se soumettant aux tentations orchestrées par le diable. C’est en usant de la Parole divine qu’il saura tirer les bonnes armes pour le chasser. Prions pour que le monde accepte le baptême comme chemin de libération de toutes les oppressions pourtant bien présentes dans nos relations sociales. Œuvrons pour protéger notre jeunesse des maux qui l’agressent et indiquons-lui le chemin d’excellence qui emprunte les rudes sentiers escarpés dans le but d’atteindre le sommet et profiter d’une vue imprenable, là où se ressent la vraie joie.

Notre Père.

image_pdfimage_print

Je confie mon intention de prière

Votre intention sera confiée à la prière des sœurs de Saint-Paul de Chartres.