#315 « Toi, viens et suis-moi ! »

Voici une parole attirante de Jésus. Mais c’est une parole qui nous fait peur. En effet, Te suivre, Jésus, mais où et comment ? Les apôtres ont accueilli cet appel, et il est nécessaire de comprendre comment cet appel à suivre Jésus peut être vécu dans l’Église aujourd’hui. Une vocation répond à cela : la vie consacrée dans le célibat.

Avant de découvrir plus avant cette forme de vie chrétienne, permettez-moi de vous dire que je suis actuellement au Gabon accompagné par une délégation de laïcs chartrains, dans le diocèse d’Oyem qui nous accueille durant une semaine. Nous découvrons la grande forêt équatoriale, luxuriante avec, sa faune et sa flore comme ses arbres immenses. L’Église y est très vivante, les Gabonais étant très majoritairement catholiques. Le diocèse de Chartres bénéficie d’une relation historique avec ce diocèse africain. Nous nous connaissons bien. Plusieurs prêtres de ce pays sont en ministère en Eure & Loir. Cette fois-ci, nous retrouvons avec joie le père Godefroy qui a servi plusieurs années, notamment à l’église Saint-Pierre à Chartres, le père Pascal venu il y a deux ans à Chartres et le père Olivier qui fut étudiant en mission à Dreux. Monsieur Jean-Vincent Ondo Eyene nous ouvre largement ses portes et, à son invitation, j’aurais la joie d’ordonner deux nouveaux diacres ce samedi 1 février. C’est là l’expérience concrète de l’universalité de l’Église, c’est en ce sens qu’elle est catholique, cet adjectif signifiant universel. Ces liens sont donc précieux.

Dimanche 2 février, nous fêterons la Présentation de Jésus au Temple. Dans la Bible, la coutume prévoit que le premier enfant soit consacré au Seigneur. Joseph et Marie apportent donc leur nouveau-né Jésus, conformément à la tradition. Ils l’offrent à Dieu, reçoivent la mission de l’éduquer et, pour le racheter, offrent deux tourterelles – qui seront ensuite relâchées – comme offrande. Au temple, ils rencontrent deux personnes merveilleuses, le vieillard Siméon et une vieille femme veuve Anne, qui prophétisent sur l’enfant : « mes yeux ont vu le salut, lumière pour éclairer les nations et gloire de ton peuple Israël, ô Seigneur ». Cet épisode de l’évangile est l’occasion de fêter les personnes consacrées, religieux et religieuses, ceux et celles qui ont choisi de vivre un célibat pour le Royaume dans une chasteté totale. Certes, hommes et femmes sont créés pour s’unir et procréer. Parmi nous baptisés, certains reçoivent de l’Esprit Saint le charisme de cette consécration vécue dans un célibat pour être tout à Dieu au cœur du monde, que ce soit dans un monastère, ou rattaché à une congrégation apostolique et servante, ou encore comme laïc consacré dans le monde. Dans cette dernière situation, la personne travaille comme les autres, vit seule ou en fraternité de vie, et assume une vie de prière dense pour porter la vie de l’Église et ses missions dans une supplication quotidienne. Des millions de fidèles vivent ainsi ce célibat pour le Royaume. Ce sont des veilleurs qui nous accompagnent avec discrétion. Ils forment une chaîne qui soutient l’évangélisation de la société. Leur joie et leur fidélité sont un signe et un encouragement précieux pour tous. Ce 2 février, sachons les honorer si nous en connaissons certains.

Rappelons-nous du verset du psaume 8 « qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui ? » Pouvons-nous voir en cette vie consacrée une voie d’excellence pour vivre reliés à notre Dieu créateur ? « Tu nous as fait pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose en Toi » écrivait saint Augustin. Si le choix d’une consécration entière effraie parfois les jeunes car elle ne correspond pas aux codes du monde actuel, il demeure le choix audacieux du don de soi, à condition qu’il soit pleinement libre. Cela demande une vie spirituelle profonde et persévérante afin de discerner cet appel. Bien entendu, le célibat appelle l’abandon de toute sexualité active avec un conjoint mais ouvre la voie à une large communion de cœur avec les autres chrétiens et même au-delà. Chacun de nous est un être sexué, mais ceux qui ont fait le choix libre du célibat consacré offrent au Seigneur leur capacité à procréer pour témoigner de l’Amour divin qui peut combler un cœur humain. L’homme est toujours fait pour plus que soi. « Il n’est pas bon que l’homme soit seul » (Gn 1,18) affirme le livre de la Genèse. Cela est vrai. Le besoin fondamental de l’homme à ne pas être seul trouve habituellement une réponse dans le mariage, mais il peut également s’épanouir dans diverses formes de fraternité. Quand l’église locale est une famille fraternelle, attentive à chacun, la personne célibataire expérimente l’affection des frères et des sœurs, elle se sait entourée et soutenue, elle goûte à une forme de tendresse non charnelle mais affective. Les personnes se soutiennent face aux épreuves de la vie. L’être humain a besoin d’une communauté et parfois de plusieurs : la famille, l’équipe professionnelle, la paroisse, etc.

Réfléchissons sur une question : les consacrés sont-ils aimés de manière spéciale par Dieu ? En réalité, personne n’est plus aimé par Dieu qu’un autre. Dès notre naissance, nous sommes tous destinés à la béatitude éternelle et le baptême nous en donne la promesse. Mais il existe une injustice dans le fait d’ignorer l’amour divin parce que personne n’en parle ouvertement. L’évangélisation est donc une urgence. C’est pour cela que Jésus dit à cet homme dont le père est décédé : « toi laisse les morts enterrer les morts et pars annoncer le Royaume de Dieu » (Lc 9,60). C’est une parole ferme qui peut choquer car toute personne souhaite en principe accompagner un proche parent lorsqu’il meurt. Jésus signifie là la priorité due à l’annonce de la Bonne Nouvelle et de l’Espérance en la vie éternelle. L’évangélisation n’est pas du prosélytisme mais elle a pour objet la réparation de cette injustice par la transmission de la Parole de vie. En effet, personne ne sait que l’homme est le temple de l’Esprit si cela ne lui est pas enseigné par l’annonce de la Parole et transmis par le baptême. Or l’Esprit est Dieu dans son parfait amour de communion. L’Esprit nous fait devenir « enfants de la lumière » (Eph 5,8).

Nous affirmons que la vraie vie de l’homme, c’est la vie dans le Christ. À l’écoute du Saint-Esprit, l’homme accomplit sa vocation. Avec le Christ, l’homme découvre et vit librement, car être libre s’accomplit dans l’amour parfait. À l’inverse, tout ce qui contredit l’amour blesse notre liberté et lie notre âme au mal qui affecte alors notre joie au point que l’homme devient triste et désabusé. Le projet divin est tout autre. Par sa passion, le Christ nous a délivré du Malin et du péché. « Il nous a mérité une vie nouvelle dans l’Esprit Saint, sa grâce restaure ce que le péché avait détérioré en nous » (Cf. CEC 1708). Pour comprendre le choix de la vie consacrée, il est nécessaire de passer par l’expérience de la Miséricorde divine qui libère de ce mal et de ses conséquences, pour embrasser ensuite librement l’appel de l’Esprit à se donner entièrement. C’est pour cela que la société et souvent les journalistes ne comprennent pas ce qui peut pousser certains chrétiens à faire le choix de la vie religieuse et du célibat pour le Royaume. Le Christ n’invite pas à manquer mais à posséder la meilleure part, à vivre une vie pleine dans la lumière. Certains sont éblouis par la rencontre du Christ vivant et, presque du jour au lendemain, abandonnent ce qu’ils possèdent pour se mettre à sa suite. Seulement ceux qui peuvent comprendre comprendront. Jésus n’a-t-il pas promis que ceux qui laisseraient maisons, champs et famille pour le suivre recevraient le centuple ?

L’Église ne dénigre pas la vocation naturelle au mariage ni la parentalité. Elle cherche même à dire toute la valeur de la famille unie dans la lumière divine. Dieu nous crée pour que nous vivions cet état de vie commun à beaucoup de personnes, dans l’amour, unis par un sacrement qu’est le mariage. Néanmoins, secrètement, il appelle certains parmi nous à une autre vie, en faisant un autre choix qui certes apparaît très exigeant, afin de vivre une autre fécondité à travers le don de soi. Comment entendre cet appel ? La voie normale est d’avoir une profonde vie spirituelle en donnant un temps conséquent chaque jour à la prière. Dans cette activité, le Christ parle en notre cœur. Là, nous pouvons écouter le doux murmure de son cœur tout en méditant les évangiles. Chaque baptisé devient prêtre, prophète et roi. Les consacrés et les religieux que nous honorerons en cette fête de la présentation de Jésus au Temple sont les témoins vivants que « Le Christ n’enlève rien, il donne tout » selon la belle formule du pape Benoît XVI. Ils nous stimulent dans la confiance. Ils nous désignent le chemin des béatitudes. Heureux ceux qui entendent la voix de Dieu et qui la suivent.

Je vous propose de prier ensemble pour que des jeunes gens se lèvent et se consacrent totalement. Prions pour que tous les fidèles comprennent mieux ce charisme de la vie consacrée et soutiennent ceux et celles qui en font le choix. Confiez-les à Notre-Dame de Chartres qui attire beaucoup de pèlerins en ce jubilé des 1000 ans de la crypte de la cathédrale.

Je vous salue Marie.

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Je confie mon intention de prière

Votre intention sera confiée à la prière des sœurs de Saint-Paul de Chartres.