#289 « Les Jeux Olympiques et la fraternité, réalité ou déception ? »

Cette première semaine des J.O. est magnifique et je loue Dieu pour ce moment unique de joie et de sport. Pourtant le contexte mondial est gravement troublé. La guerre continue avec ses crimes. Des pouvoirs iniques confortent leur puissance contre la volonté des peuples. La fraternité est une richesse difficile à vivre.

Dans l’encyclique Fratelli tutti, le septième chapitre propose des parcours de paix pour guérir nos relations brisées et se retrouver frères et sœurs. Le Pape parle de la vérité, « compagne indissociable de la justice et de la miséricorde » (FT 227), que chacun doit rechercher et reconnaître comme fondement de l’itinérance à effectuer entre personnes blessées puisque « la vérité vous rendra libre » affirme Jésus. Le Saint Père cite l’Église d’Afrique du Sud qui appelle une nouvelle société fondée sur le service des autres, « dans laquelle la valeur d’être ensemble en tant qu’êtres humains prime incontestablement sur l’appartenance à tout autre groupe plus restreint, que ce soit la famille, la nation, la race ou la culture. » Désirons-nous en tant que catholiques cette ouverture ? Pouvons-nous en vérité affirmer que nous aimons la société et tous ceux qui la composent, même ceux qui sont les plus différents de nous ? « Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a envoyé son Fils unique » (Jn 3,16) pour le sauver de la mort. Mais voici que l’actualité nous rattrape et nous questionne sur la fraternité.

Les jeux olympiques sont un événement planétaire extraordinaire. Ils constituent un moment unique pour exprimer la fraternité. Certes, quelques ombres apparaissent lorsque certains groupes font pression pour glisser un message politique, souhaitant exclure ceux en qui ils voient des ennemis. Heureusement, la fraternité est merveilleusement signifiée lorsque les compétiteurs se saluent, se remercient, se félicitent, lorsque les spectateurs communient aux exploits accomplis, lorsque les épreuves de sport sont prolongés par des fêtes mémorables entre supporters, lorsque chefs d’État et personnalités s’y rencontrent, lorsque le peuple vit un moment joyeux et festif autour des valeurs du sport. Le sport est une activité indispensable pour nos corps et aussi pour notre convivialité. Il est d’ailleurs heureux de voir notre pays, la France, briller par ses résultats alors que notre population est peu nombreuse comparativement à d’autres nations. Personnellement je remercie toutes les fédérations sportives, nos écoles et nos clubs, nos villes et les sponsors. C’est leur engagement qui offre à ces jeunes gens de pouvoir aller au bout de leurs rêves.

Cependant, depuis la soirée d’ouverture des jeux à Paris, beaucoup de commentaires se font entendre. Ceux qui ont créé ce spectacle le défendent comme inclusif, artistique, certes provocant et ouvert aux réalités contemporaines. Malgré la pluie, certains tableaux furent magnifiques. Mais beaucoup ont été choqués par certaines scènes, leur vulgarité et y ont vu une atteinte au christianisme voire un blasphème. Certains pays ont interrompu la diffusion en direct. Les créateurs, qui avaient d’abord assumé la création d’un tableau intitulé « la Cène » suivi d’un autre « Le festin des dieux » disent désormais avoir repris les mythes de l’Olympe et leurs dieux païens. La référence ne serait pas la Cène de Léonard de Vinci (Santa Maria delle Grazie, Milan), mais le Festin des dieux de Harmensz van Biljert (musée Magnin, Dijon). La ressemblance avec la peinture de Léonard de Vinci représentant la sainte Cène où Jésus est entouré par les apôtres avant sa passion est flagrante : le tableau du Festin des dieux constituait déjà un détournement païen d’un épisode chrétien. C’est bien parce que la référence visuelle à la fresque de Léonard de Vinci est évidente pour de très nombreuses personnes (ce qui n’est pas le cas du tableau du Festin des dieux) que les réactions sont si vives. Si la liberté d’expression est défendue en France avec vigueur, peut-on s’autoriser des excès sans limites qui atteignent des personnes dont la croyance est sacrée au point qu’elles donneraient leur vie pour Dieu ? La foi chrétienne est fondée sur la venue de Dieu parmi les hommes, en Jésus-Christ qui a offert sa vie physiquement par un unique sacrifice définitif en vue du salut de toute l’humanité, sacrifice qui se prolonge aujourd’hui dans chaque messe depuis deux mille ans. En travestissant grossièrement la sainte Cène, il est indéniable que tous ceux et celles qui vivent l’eucharistie comme sommet et source de leur vie spirituelle sont atteints et meurtris. Jésus a dit « je suis le pain de vie, qui me mange a la vie éternelle » (Jn 6,35). Cela n’est pas juste un conseil de Jésus, là est le chemin en vue du Ciel.

Maintenant quelle est la juste réponse face à ces faits ? Jésus nous a prévenu : « Si le monde a de la haine contre vous, sachez qu’il en a eu d’abord contre moi (Jn 15,18). Aussi ouvre-t-il son discours sur la montagne par ces mots : « Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi. Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux ! » (Mt 5,11-12) Notre réponse doit-elle être la joie évangélique ? Saint Paul insiste « soyez dans la joie, je vous le redis, soyez toujours dans la joie » (Ph 4,4). La joie comme don de l’Esprit n’exclut pas l’expérience de la souffrance. Oui, nous souffrons de voir notre religion moquée. J’entends la voix de catholiques qui veulent aller au combat pour défendre l’honneur de Dieu et la sainte Messe, comme on partait jadis en croisade. Certes l’eucharistie, vécue chaque dimanche, adorée dans le Saint-Sacrement, est bien la « source et le sommet » de bien des chrétiens. Et la vivacité des réactions, l’indignation, la colère même de certains, témoignent de l’amour qui est porté au Christ. Mais comment le Christ a-t-il répondu aux menaces, aux insultes, aux moqueries et autres crachats ? Par son silence face à Pilate. Par son pardon face à ses bourreaux en disant à Dieu le Père « pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23,34), en portant sa Croix alourdie par les péchés des hommes jusqu’à sa crucifixion. C’est pourquoi le centurion qui se tenait au pied de la Croix, témoin de sa mort, dira « vraiment cet homme était Fils de Dieu » (Mt 27,54); il s’est converti, reconnu saint et honoré sous le nom de saint Longin dans la légende dorée.

Faut-il dire des messes et prier des chapelets en réparation pour le blasphème ? Des posts sur les réseaux sociaux, dont on ne connaît pas toujours les auteurs, invitent à se retrouver au pied des calvaires et dans les églises. Alors demandons-nous : fallait-il cette atteinte à notre foi pour nous mobiliser ? Notre péché personnel ne devrait-il pas nous conduire à choisir le sac et la cendre comme le Roi de Ninive prévenu par le prophète Jonas ? Les scandales sexuels dans l’Église commis par des clercs et des laïcs nous ont-ils tous mobilisés pour des prières de réparation ? Quand la honte s’est abattue sur l’Église, certains catholiques affirmaient que nous en faisions trop pour les victimes et qu’ils ne paieraient pas pour la réparation. À la lecture des évangiles, la voie des chrétiens est notre propre conversion. Jésus l’exige dès le début de son ministère. Aussi voyons l’humble chemin qu’il nous faut emprunter pour une Église pauvre comme l’est le Christ qui n’avait pas de pierre où reposer la tête. Recherchons la fraternité en incluant ceux et celles qui nous sont si différents, par leur histoire, leurs origines, leurs mœurs, leur vie sexuelle, leur vision de la société afin que nous recevions d’eux ce qu’ils portent comme richesse d’amour, et que, peut-être, nous puissions leur témoigner de l’amour infini de Dieu. Pour créer cette authentique fraternité, Jésus nous supplie de « demeurer dans l’amour » et saint Jean précise « demeurer en Jésus-Christ ». Oui, « heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux » (Mt 5,3).

Jésus nous redit le chemin : « Voici ce que je vous commande : c’est de vous aimer les uns les autres (Jn 15,17) ». Aussi, réjouissons-nous, prions et témoignons au monde de la richesse infinie de la grâce divine, en montrant notre joie d’être chrétien et d’avoir Jésus comme maître et Seigneur. Que chacun reçoive le corps du Christ avec grand soin car à cet instant nous recevons celui qui donne tout par amour pour nous sauver. Le monde païen, éloigné de Dieu, se convertira en voyant l’amour que nous lui porterons. Ainsi la fraternité brillera.

Je vous encourage à prier pour notre Église afin que chacun en tant que pierre vivante s’attache au Christ et à sa Parole de vie.
Notre-Père.

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