#159 « Pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis ! »

Jésus, Fils de Dieu fait homme, est la figure indépassable de l’amour pour les autres. Tous les rejetés et les exclus de son époque, les lépreux particulièrement, trouvèrent un accueil et une sollicitude qui tranchaient avec les coutumes. Auprès de Lui, ceux qui n’avaient pas droit de cité devenaient ses bien-aimés. Pour eux, pour les pauvres, pour les pécheurs, Jésus a donné sa vie. « Pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux que l’on aime » (Jn 15, 13). C’est une des règles d’or des Saintes Écritures que nous recevons de Lui et que nous sommes appelés à vivre. Donner sa vie, nous sommes parfois prêts à le faire, mais jusqu’où ? Un peu de notre temps, un peu de notre argent, un peu de soi, effectivement beaucoup s’y essaient, mais donner vraiment notre vie, partir comme Abraham en laissant son pays, oser l’aventure du cœur voire consacrer sa propre vie pour la joie, la santé, l’éducation des autres, c’est un chemin admirable que peu empruntent.

Aujourd’hui, certains chrétiens donnent leur vie au Christ dans des conditions de profonde précarité sociale, voire de persécutions. Ils sont 350 millions dans le monde. Ce sont les chrétiens persécutés qu’ils soient empêchés d’accéder aux mêmes droits que leurs concitoyens ou réellement menacés physiquement. Et pourtant, ils manifestent une foi si vive que nous la leur envions. Effectivement, il leur faut choisir et s’engager. Devant les graves menaces, le chrétien décide de demeurer avec Jésus ou il renonce à être son disciple.

Pour leur rendre hommage, une très belle soirée appelée « la nuit des témoins » s’est déroulée mercredi 26 janvier à la cathédrale, avec le témoignage d’une religieuse arménienne, d’un prêtre sri-lankais et d’un autre prêtre nigérian. Un moment aussi bouleversant fut le défilé des visages de chrétiens, laïcs et consacrés, assassinés en 2020, particulièrement par les cartels de la drogue. En Birmanie 24 laïcs furent brûlés vifs dans leur église le soir de Noël 2021.

Les martyrs que nous honorons sont des femmes et des hommes qui ont choisi de marcher à la suite de Jésus pour que leur vie témoigne d’un amour plus grand que ce qu’ils pouvaient donner humainement aux autres. Ils se sont laissé habiter, éclairer, traverser par la présence de Jésus en eux, se nourrissant de sa parole qui leur rappelait combien l’amour des frères est premier. Certains étaient discrets dans leurs engagements. D’autres étaient plus connus au sein des communautés chrétiennes où ils donnaient le meilleur d’eux-mêmes. Ils ne recherchaient pas le martyre. Ils voulaient être des serviteurs. Conduits par l’Esprit Saint, ils ont été des soignants, des éducateurs, des enseignants, des pasteurs, des religieux et des religieuses. Mais voici que ces martyrs ont versé leur sang pour le Seigneur, par leur vie ils ont aimé le Christ, ils l’ont imité dans leur mort, méritant ainsi la couronne du vainqueur dont parle saint Paul dans ses lettres. Le martyre n’est pas vain car, comme le disait Tertullien, le sang des martyrs est une semence de chrétiens.

Une des premières martyrs de l’histoire de France fut sainte Blandine. Esclave, cette frêle jeune fille arrêtée comme d’autres chrétiens, emprisonnée et maltraitée, sut faire face à la violence et la méchanceté de ses bourreaux avec une détermination qui surprit ceux qui assistaient aux derniers jours qu’elle vécut sur terre avant d’entrer dans la gloire de Dieu. Ainsi, si aucun de nous ne peut se préparer en vérité à être martyr, ces frères et sœurs dramatiquement assassinés récemment dans divers pays nous inspirent. N’ont-ils pas approfondi, au long des années, leur relation avec Dieu par une prière fidèle et fervente au sein de leur communauté chrétienne ? Oui, ces hommes et ces femmes se sont faits serviteurs de l’amour. Ils ont laissé leur cœur être transpercé par toutes les injustices que subissent souvent les petits et les pauvres pour les dénoncer et faire venir à la lumière les situations calamiteuses de vie qui devenaient insupportables et qu’on ne peut tolérer.

Jésus nous a promis sa présence mais aussi il nous avait prévenu : « Vous allez entendre parler de guerres et de rumeurs de guerre. Faites attention ! Ne vous laissez pas effrayer, car il faut que cela arrive, mais ce n’est pas encore la fin. On se dressera nation contre nation, royaume contre royaume ; il y aura, en divers lieux, des famines et des tremblements de terre. […] Alors, vous serez livrés à la détresse, on vous tuera, vous serez détestés de toutes les nations à cause de mon nom. Alors ce sera pour beaucoup une occasion de chute ; ils se livreront les uns les autres, se détesteront les uns les autres. Beaucoup de faux prophètes se lèveront, et ils égareront bien des gens. À cause de l’ampleur du mal, la charité de la plupart des hommes se refroidira. Mais celui qui aura persévéré jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé. Et cet Évangile du Royaume sera proclamé dans le monde entier ; il y aura là un témoignage pour toutes les nations. Alors viendra la fin. » (Mt 24, 6-14)

Pourquoi cette violence ? Pourquoi les êtres humains ne sont-ils pas capables de choisir la paix ? Nous faudra-t-il être martyr ? Heureusement, ce n’est pas la voie qui est demandée à chaque catholique. Il y a des pays où la foi se vit librement, avec le risque cependant de nous endormir dans un certain confort. Nous pouvons admirer le courage et la foi de ceux qui acceptent de traverser de telles épreuves. Le chrétien veille pour ne pas être surpris par l’ennemi. Comment veiller ? En demeurant en sa présence, avec la force que donnent la prière et les sacrements. Nous parlions récemment de la liturgie des heures, c’est-à-dire du bréviaire. Voilà une arme spirituelle dont nous pouvons user afin de demeurer connectés à Jésus, source de tout amour. La fidélité sera le signe de notre amour pour Dieu. Avez-vous pris cette bonne habitude ou avez-vous commencé à prier l’office des heures ? Le prochain carême peut être une belle opportunité pour mettre en place ce rituel.

Comme la prière est la respiration de l’âme, si nous sommes des priants, alors tout notre être en est illuminé et nos œuvres inspirées par l’Esprit permettent que notre charité soit active et réelle. La prière ouvre en grand le canal de la grâce, elle donne la paix, apaise les tensions, elle éclaire les choix, elle ouvre la voie du pardon, elle dispose à aimer même ceux qui font du mal. Comme dans la parabole des talents, Jésus nous dira : « Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton Seigneur » (Mt 25, 21). Être Marthe et Marie en même temps, voici un bel équilibre pour que la grâce divine et notre nature se complètent en vue d’une vraie fécondité spirituelle.

L’Église est appelée à être une église de témoins. Nous demandons l’intercession de tous ces saints martyrs, ceux qui sont canonisés comme ceux qui ne le sont pas, afin d’être rendus fidèles à notre vocation profonde de chrétiens, disciples unis au Christ dans notre vie quotidienne.

Prions ensemble maintenant :

Dieu de puissance et de Miséricorde, nous supplions ton infinie bonté : par la prédication des saints martyrs, tu as répandu au cœur des peuples la connaissance de ton fils unique ; par l’intercession de ces frères et sœurs martyrs, affermis-nous dans une foi inébranlable. Par Jésus le Christ notre Seigneur.

Et c’est à la Vierge Marie que nous voulons ce jour confier nos amis persécutés de par le monde.

Je vous salue Marie,

Pleine de grâce

Le Seigneur est avec toi,

Tu es bénie entre les femmes

Et Jésus le fruit de tes entrailles est béni.

Sainte Marie, pleine de grâce,

Prie pour nous pauvres pécheurs,

Maintenant et à l’heure de notre mort,

Amen.