#153 « Aujourd’hui, un Sauveur nous est né : c’est le Christ, le Seigneur ! »

Ce soir, c’est la nuit de Noël. Lorsque nous étions enfants, nos parents nous réveillaient vers 23h pour partir endormis à la messe de minuit, dans la neige. Nous devions attendre le matin du 25 pour ouvrir nos paquets. La nuit était courte et fébrile pour savoir si nos parents avaient bien compris nos désirs et quelles surprises ils avaient préparées. Ce soir, nous célébrerons encore dans la nuit, même si beaucoup de familles, avec les petits enfants, choisiront une messe dans la soirée. Je me rappelle les belles crèches vivantes avec de nombreux enfants costumés qui étaient réjouis par leur rôle durant la veillée précédant l’eucharistie. Tels les bergers émerveillés devant l’enfant nouveau-né, ils venaient ébahis voir la sainte famille jouée par un jeune couple dont l’enfant venait de naître quelques semaines auparavant. Ce soir, chacun confiera à Jésus ses besoins et ses désirs, et déposera ses cadeaux aux pieds de notre Seigneur. Pour l’un ses petits sacrifices, un autre ses services rendus, un troisième son engagement à le suivre totalement, chacun selon sa mesure.

Ce matin de Noël, je vous propose une belle prière écrite par des membres de la Mission ouvrière. Mais qu’est-ce que la Mission Ouvrière ? C’est un service d’Église qui coordonne les acteurs de l’évangélisation dans le monde ouvrier et les quartiers populaires. Ainsi réunit-elle plusieurs mouvements de l’Action Catholique et forment leurs membres pour sortir à la rencontre des habitants des périphéries. Les mots de ce texte nous élèvent vers le Ciel d’où vient le Sauveur et ils nous relient à la vie des hommes et des femmes d’aujourd’hui. Aussi prions d’un même cœur auprès de la crèche.

Prière de Noël

Noël, Noël !

Jésus naît à notre monde

Savourons la joie de ce cadeau inouï,

Dans cette vie nouvelle donnée à notre Terre

S’accomplit la promesse de Dieu.

Jésus, enfant de gens ordinaires,

Devant eux, toutes les portes se ferment.

Sans doute ne valent-ils pas la peine

Qu’on leur fasse de la place.

Jésus, si fragile, vulnérable,

Dès le départ menacé,

Emmené hors d’Israël pour fuir la violence d’Hérode,

Que peut-on attendre d’un sauveur que l’on cache ?

Que peut-on attendre d’un monde injuste et dur,

Où des enfants, des jeunes,

Des femmes et des hommes

Sont fragilisés, exploités,

Rejetés,

Trop souvent découragés,

Résignés jusqu’au bout du silence ?

Ils ne font pas partie des “gagnants”,

Des “bien nés”.

En ce jour de Noël,

Quel chamboulement !

Les gens les plus petits,

Ont du prix,

Ils sont même hors de prix !

C’est ça que nous révèle l’Enfant de Noël !

T’es pas comme moi, et alors ?

Les derniers sont les premiers,

Les étrangers, les bienvenus,

Les jeunes des cités attendus

Les filles, les femmes ont toute leur place,

Tous les êtres humains sont aimés :

Les vieux, les malades,

Tous également dignes,

Tous sacrés,

Ils sont à l’image de Dieu.

Jésus met à notre portée

Un Royaume nouveau,

Révolutionnaire,

Un avenir donné à notre Terre,

En pièces détachées.

Pour l’assembler, tous les Hommes sont embauchés !

Chaque geste de fraternité,

Chaque combat pour la dignité,

Le respect, le vivre ensemble,

L’accès pour tous à une culture de qualité

Le maintien des systèmes de solidarité :

chômage, santé, retraites,

Chaque action contre la fermeture des écoles,

Des entreprises,

Des services publics,

Chaque acte de résistance à la maltraitance des enfants,

Des jeunes, des travailleurs

Qu’ils soient français ou étrangers sans papiers,

Chaque lutte en faveur de la justice sociale,

Ici et partout dans le monde,

Réalise la promesse d’alliance faite par Dieu

aux Hommes :

L’amour l’emportera sur la haine et la violence

La vie vaincra la mort.

En ce temps de Noël,

Laissons-nous embaucher,

Laissons Jésus nous rappeler l’exigence d’aimer,

Comme lui, jusqu’au bout.

Alors, apôtres de l’Amour,

Engagés auprès de ceux qui bousculent la fatalité

D’un monde voué à l’inégalité,

Habités d’une formidable Espérance,

Remplis de la joie de Noël,

Nous pouvons TOUT !

Amen, oui, ce soir ce sont les violences que nous refusons, les critiques, les médisances et les jugements qui séparent que nous excluons, pour faire monter sur nos lèvres des paroles de bonté et de joie partagée. Dans l’espace complexe de nos vies en cette société, cette prière qui vient du monde ouvrier nous rejoint et nous déplace. L’ouvrier est une personne travaillant au service des autres, avec discrétion, telles celles qui assurent l’entretien des bureaux, celles qui livrent les colis, celles qui tiennent les caisses des magasins et qui voient passer nos caddies remplis. L’ouvrier est dans les usines de production l’homme qui assure des tâches manuelles, et qui est au bas de la chaîne hiérarchique.

Cette prière promet une formidable espérance remplie de la joie de Noël. C’est parfois merveilleux de voir des personnes qui vivent de peu de choses et qui savent s’émerveiller devant le Mystère de Dieu qui se fait d’homme.

Isaïe prophétisait : « le désert et la terre de la soif, qu’il se réjouissent ! Le pays aride, qu’il exulte et fleurisse comme la rose, qu’il se couvre de fleurs des champs, qu’il exulte et crie de joie ! » (Is 35,1–2). Quand on parcourt les déserts du Moyen-Orient balayés par des vents puissants, où vole une poussière aveuglante, où aucune vie semble ne prendre racine, il est incroyable d’assister au fleurissement soudain après un orage. Les plantes jaillissent partout, le temps d’une floraison éphémère. L’Église est comparable à ce désert, mais elle sait que l’Esprit Saint peut la féconder pour que des grâces nouvelles fassent surgir des fruits évangéliques. Comment cela se fera-t-il ? dit la Vierge à l’ange Gabriel. « L’Esprit Saint te couvrira de son ombre » lui annonce-t-il. Il est dit en théologie que ce que l’on dit de Marie, on peut le dire de l’Église. Oui soyons assurés que Dieu veut couvrir l’Église de son ombre ce qui signifie la nuée ou encore sa présence qui précédait Moïse dans le désert.

Entrons plus avant dans la prière du cœur, dans ce moment de silence quotidien en murmurant à Jésus des mots d’amour et en demeurant en silence pour l’entendre nous inspirer le chemin à prendre. En toute chose, dans vos projets et vos activités, vos rencontres et vos célébrations, laissez-vous conduire par l’Esprit du Seigneur. C’est lui qui apportera la réponse à nos attentes et à nos demandes, aussi nous lui faisons confiance pour notre vie spirituelle et pastorale, pour rassembler des équipes et trouver des collaborateurs. L’Église est une famille et il importe que chacun soit valorisé et qu’émergent ainsi des talents cachés par pudeur.

En attendant la manifestation glorieuse du Seigneur, Isaïe dit encore : « fortifiez les mains défaillantes, affermissez les genoux qui fléchissent, dites aux gens qui s’affolent : soyez forts, ne craignez pas. Voici votre Dieu. Il vient lui-même, il va vous sauver ». En méditant ces mots, je pense particulièrement à nos établissements scolaires, aux équipes pédagogiques qui ont porté lourdement le poids du jour en ces mois de pandémie. Que tous vous soyez bénis et rassurés, l’Église est cette famille qui vous accompagne et qui vous exprime sa confiance pour que nos jeunes et nos enfants grandissent en humanité dans la lumière du Christ vivant.

Ce soir, nous irons à la messe de la nuit pour ceux et celles qui peuvent sortir. Avant la sainte communion, chacun sera invité à donner la paix de Dieu à un voisin. Ce geste merveilleux consiste à offrir le Christ que nous portons en nous et à nous relier par lui les uns aux autres. C’est beaucoup plus qu’un geste de salutation. L’Annonciation faite à Marie peut nous inspirer par les mots de l’ange à Marie « je te salue Marie, pleine de grâces. » Certes, seule Marie peut être qualifiée ainsi, être pleine de grâces. Alors il est possible de donner à ses proches une bénédiction en s’inspirant de ces mots « ô mon ami, je te salue, tu es plein de la grâce de Dieu, le Seigneur est avec toi. »

Qu’en cette nuit de Noël, personne ne soit oublié. Que résonnent nos chants joyeux.

Il est né le divin enfant

Jouez hautbois, résonnez musettes

Il est né le divin enfant

Chantons tous son avènement.

  1. 1. Depuis plus de quatre mille ans

Nous le promettaient les prophètes

Depuis plus de quatre mille ans

Nous attendions cet heureux temps.

  1. 2. Une étable est son logement

Un peu de paille est sa couchette

Une étable est son logement

Pour un Dieu quel abaissement