#127 « Notre Sauveur, le Christ Jésus, a détruit la mort ; il a fait resplendir la vie par l’Évangile»
Avec l’aide du pape François, en lisant son exhortation « la joie de l’Évangile » (Amoris Lætitia), nous avons réfléchi et discerné comment mieux nous aimer, au sein de la vie de couple et de la famille, entre chrétiens et avec ceux et celles qui partagent nos vies sociales. L’hymne à l’amour écrit par saint Paul dans la première lettre aux Corinthiens demeure comme la lumière d’un phare. Sainte Thérèse de Lisieux ne l’avait-elle pas bien compris lorsqu’elle disait « aimer c’est tout donner et se donner soi-même. » ? Oui, le fondement de toutes nos relations est l’amour, l’agape, amour de soi total pour le bien d’autrui et notre joie.
Nous sommes fin juin et c’est l’été, le temps des vacances. La nature est magnifique. Les bonnes pluies lui ont donné des couleurs splendides et, à l’évêché, les coquelicots ont fleuris de manière exceptionnelle. « Levons les yeux, chantons notre Dieu ! » entrons dans la louange chaque matin. La louange est la forme de prière qui parcourt toute la Bible sous forme de psaumes et d’hymnes. Par la musique et la beauté des textes, notre esprit et notre cœur sont disposés à la présence du Seigneur, ils s’orientent vers lui. La louange nous décentre de nos questions et de nos problèmes. Elle ajoute de la vie à la vie. Elle nous offre de l’espace pour respirer et recevoir la joie de l’Esprit. Loin de fuir la réalité que le chrétien affronte avec courage, elle rappelle que ce que nous avons à vivre et à affronter intéresse Dieu qui est présent avec chacun. Ne soyons pas dans la crainte de lui dire « je te bénis Père, abba, tu es avec moi, tu nous accompagnes et je te demande la grâce de vivre ce jour toutes choses dans ta lumière. » Que nous allions travailler, que nous soyons chez soi, ou que nous partions en vacances, réservons-nous un quart d’heure matinal pour louer Dieu. Chantons-le par de libres paroles et prions les psaumes de l’office du matin et de la messe. Ce sera comme un baume doux et parfumé sur notre âme, qui nous fera sourire pour aborder une nouvelle journée. Dieu habite dans les louanges de son peuple.
Jésus ne part pas en vacances de son côté. En effet, il a promis d’être avec nous chaque jour et nous sommes en vacances avec Lui ! Comment vivre ces jours en sa présence ? La louange ouvre chaque journée. Nous pouvons poursuivre par le chapelet, merveilleuse prière que l’on peut reprendre en marchant, en vélo, en voiture – mais veillons en restant vigilants ! – ou le soir au repos. La lectio divina, comprenez la lecture méditée d’un passage biblique, sera source de grâce car qui aime le Seigneur lit et garde sa Parole. Se fixer la lecture de certains livres de la Bible, pourquoi pas ceux que nous connaissons moins et qui sont si lumineux, comme les livres de Judith, de Ruth, d’Osée, d’Isaïe, le Cantique des cantiques, ou encore un livre de sagesse comme Ben Sirac le Sage. Le choix est large. La liturgie dominicale n’en propose que de brefs extraits pour éclairer l’Évangile, aussi n’avons-nous pas une vue globale de ces textes. Profitons de ces temps de repos pour nous plonger dans la Parole. L’été, c’est aussi le moment des sessions catholiques souvent ouvertes aux enfants, dans certains monastères ou encore dans les lieux de pèlerinage. Prendre le temps d’une session est un bienfait après la pandémie. La rencontre pleine de bienveillance avec tous est une richesse et une joie. Souvent les enfants et les adolescents y sont accueillis avec des programmes spécifiques qui leur donnent en quelques jours une connaissance approfondie et offrent un renouveau de la foi. L’été est donc un temps béni pour vivre en présence de Jésus. Ajoutons nos merveilleuses églises, ouvertes je l’espère partout, pour faire halte et méditer. Notre beau pays a été habité par tant de saints et des saintes à découvrir dans ces régions. Je vous en souhaite une découverte émerveillée et émets le vœu que vous puissiez vivre cette itinérance avec Jésus entouré de quelques amis croyants : ensemble on va plus loin.
Il est maintenant temps de conclure avec le chapitre 9 du texte du pape, qui parle de spiritualité matrimoniale et familiale. « La spiritualité matrimoniale est la spiritualité du lien habité par l’amour divin […] la Trinité est présente dans le temple de la communion matrimoniale. » C’est dire combien la présence divine et trinitaire, comme échange d’amour, vient habiter la communion des époux, telle une invitation à l’ouverture du cœur pour que l’Esprit y transfigure nos actes quotidiens et pour que chacun élargisse son amour au monde autour de lui, qui a tant besoin de rencontrer l’amour, le seul parfait amour, celui qui vient de Dieu. Nous comprenons que la vie conjugale devient alors témoignage d’un don d’amour infiniment grand appelé à être donné à tous. Vivre cette spiritualité matrimoniale pourrait sembler un chemin facile et réservé à ceux qui ne souffrent pas, mais en réalité, elle inclut la Croix que Jésus a portée, qu’il nous présente pour que nous l’embrassions et la portions avec lui. « Mon joug est léger » dit-il, car c’est lui qui remplace dorénavant Simon de Cyrène pour porter nos douleurs. Aimer peut être une croix. Persévérer peut être vraiment douloureux. Le conjoint peut devenir une croix, dans la maladie ou l’incompréhension. Il y a toujours une dimension pascale dans l’amour qui dure, une mort à soi-même qui conduit à la résurrection en faisant pleinement confiance au Christ présent et ressuscité. Comment vivre cela ? Par la bienveillance choisie toujours. Par la prière en couple. Le pape nous dit : « Par des mots simples, ce moment de prière peut faire beaucoup de bien à la famille. Les diverses expressions de la piété populaire sont un trésor de spiritualité pour de nombreuses familles. » (n°318).
Au cœur de la spiritualité matrimoniale se trouve le Seigneur. Le chrétien engagé dans une vie spirituelle profonde découvre peu à peu que son cœur désire plus que ce que son conjoint lui apporte. Comment ne pas me souvenir de ce jeune homme non baptisé qui aimait une femme catholique croyante et qui découvrait qu’il ne passerait jamais avant « son Dieu ». Attiré par sa lumière intérieure, il lut la Bible, se mit à prier, finalement il devint croyant, fut baptisé, il l’épousa et les deux profondément unis par Jésus partirent en coopération au service du Seigneur. Le pape reconnaît que « Personne ne peut plus vouloir prendre possession de l’intimité plus personnelle et secrète de l’être aimé et seul le Seigneur peut occuper le centre de sa vie. » (n°320). Il faut oublier l’illusion que le conjoint comblera notre vie et qu’il répondra à tous nos besoins. Seul le Seigneur y répond vraiment. C’est donc dans la communion conjugale en plaçant le Christ au centre de sa vie que le couple bénéficie d’une communion, y compris physique, de plus en plus profonde et féconde. Le pape dit que « vouloir fonder une famille, c’est se décider à faire partie du rêve de Dieu, choisir de rêver avec lui, vouloir construire avec lui, se joindre à lui dans cette épopée de la construction d’un monde où personne ne se sentira seul. » (n°321). La vie conjugale prend alors une forme eucharistique, elle est offrande à Dieu et entre époux, elle est féconde au-delà du couple car l’amour vrai atteint mystérieusement toute l’humanité et l’élève, elle est une action de grâce et l’enfant qui paraît est reçu comme une bénédiction divine. C’est pour cette raison que saint Paul compare l’amour de l’homme pour sa femme à l’union du Christ et de l’Église, union toute eucharistique dans un don définitif et plénier.
Il est probable que pour beaucoup de couples, cette vision semble inatteignable et idyllique. Beaucoup de facteurs et d’histoires passées rendent difficile le chemin. L’Esprit vient au secours de notre faiblesse. Pour qui espère, l’échec est une marche vers la réussite. Le pape François achève son exhortation par un encouragement. Il nous propose de marcher avec confiance, dans la lumière, même si nous nous savons pécheurs, même si nous discernons nos limites personnelles. L’homme et la femme sont donnés l’un à l’autre pour s’entraider, pour croître dans leur capacité à s’aimer, pour apporter à la société une espérance que l’amour vrai et définitif est possible et heureux, avec notre boussole orientée vers le divin Cœur de Dieu. N’oublions pas que la demande et la promesse de Dieu sont sérieuses et profondes : il nous demande une vraie conversion et nous promet miséricorde. Jésus marche avec nous et nous dit « combien le Père donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent. » (Lc 11,13) Espérons et aimons toujours.
Je vous souhaite un bel été. Prions les uns pour les autres, prions pour la mission du diocèse de Chartres et plus largement pour notre Église en France, qu’elle soit fidèle à son baptême.
Prions toujours avec foi et je vous propose une fois de plus de prier avec le père de Grandmaison :
« Sainte Marie, Mère de Dieu,
gardez-moi un cœur d’enfant, pur et transparent comme une source.
Obtenez-moi un cœur simple qui ne savoure pas les tristesses.
Un cœur magnifique à se donner, tendre à la compassion.
Un cœur fidèle et généreux, qui n’oublie aucun bien et ne tienne rancune d’aucun mal.
Faites-moi un cœur doux et humble, aimant sans demander de retour, joyeux de s’effacer dans un autre cœur devant votre divin Fils.
Un cœur grand et indomptable qu’aucune ingratitude ne ferme, qu’aucune indifférence ne lasse.
Un cœur tourmenté de la gloire de Jésus Christ, blessé de son amour
et dont la plaie ne guérisse qu’au ciel.
Amen »