Comment faire de la visite d’une église une vraie catéchèse ?
Faire visiter une église aux enfants est une étape indispensable du parcours de catéchèse car ils y sont invités pour rencontrer l’assemblée paroissiale et célébrer la messe. L’église, avec son histoire, son architecture et tout ce qu’elle offre à la vue du visiteur, est un support précieux de catéchèse.
Comment faire aimer l’église aux enfants ? Leur rendre ce lieu familier ? Le père Frédéric Roder, curé d’Épernon et accompagnateur des équipes de l’association « Accueil et visites », association chargée des visites de la cathédrale Notre-Dame de Chartres, nous explique. Il est également guide à Paris, à Rome et en Terre Sainte. Il a une expérience de 35 ans dans la catéchèse et l’aumônerie.
Comprendre l’archéologie liturgique et structurelle d’une église
Pour guider une visite d’église, il est important de connaître l’histoire parce que cela aide à comprendre l’ensemble des évolutions et à faire entrer les enfants dans une structure historique et non dans un fait architectural classique.
Une église est un lieu de rencontre, où on se parle. Le mot « église » vient du grec ekklesia qui signifie assemblée. Il en est de même pour « synagogue » qui vient du grec sunagôgê et qui signifie également assemblée.
D’abord et avant tout, ce qui compte dans une église c’est l’assemblée. C’est complètement différent du paganisme pour lequel compte plutôt le temple vide avec les colonnes autour. Ce sanctuaire vide était l’habitat de Dieu.
Dans le christianisme, on peut faire une assemblée partout ; on peut célébrer partout. C’est bien ce que fait Philippe quand il baptise l’eunuque (cf. Ac 8, 26-40).
L’eunuque dit : « Voici de l’eau, qu’est-ce qui empêche que je sois baptisé ? Il fit arrêter le char, ils descendirent dans l’eau tous les deux, et Philippe baptisa l’eunuque. » (v36-38)
Les premiers chrétiens se rassemblaient dans des maisons (domus ecclesiae). Ce qui est important, c’est l’endroit sur lequel on peut lire l’Écriture et célébrer le sacrifice. C’est l’autel. Il y a l’autel de la Parole, l’autel du sacrifice. Donc d’abord et avant tout, une église, au sens structurel du terme, est un toit sur un autel. C’est le lieu de rencontre du ciel et de la terre. Ce n’est pas l’habitat de Dieu, c’est le lieu de la rencontre des fidèles entre eux, des fidèles avec Dieu et de Dieu avec ses fidèles.
De la synagogue à l’église synagogue
Ce qui est le plus proche d’une église, c’est la synagogue ; ce n’est pas le temple de Jérusalem puisque Jésus a fait un sacrifice unique une fois pour toutes. Il n’est plus besoin de faire d’autre sacrifice. On n’a plus besoin du temple. Le voile du temple se déchire (cf. Luc 23, 45) : la présence de Dieu quitte le temple. Le temple n’est plus le lieu de rencontre. C’est l’Esprit saint qui vient dans la maison quand les portes sont closes (cf. Ac 2, 2).
Dans la synagogue ancienne, on trouve un autel et une armoire (un tabernacle, une arche) abrités par un dais en pierre. Ce dais représente la tente car Dieu a planté sa tente au milieu de nous. Chez les juifs, ce sont les rouleaux des Écritures qui se trouvent dans le tabernacle. Ainsi dans certaines églises de Rome jusqu’au VIIe ou VIIIe siècle, l’autel se trouve sous un dais.
Il y a aussi des bancs face à face d’un côté pour les hommes et de l’autre pour les femmes ou encore un espace dédié aux femmes à l’étage.
Très vite, il y a aussi des espaces sacrés qui sont des lieux pour la rencontre avec Dieu et qui sont des lieux de silence contrairement au centre de la synagogue qui est le lieu de bavardage.
Dans l’église synagogue, à côté de l’autel, on trouve un pupitre sur une estrade où on annonce la parole et de l’autre côté, on trouve les chanteurs. Sous le tabernacle, se trouve la chaise du prêtre. Le chœur est un lieu sacré où le prêtre, l’autel, la victime (dans le tabernacle) disent la présence de Dieu en plus de l’assemblée. Le prêtre, l’autel et le tabernacle se trouvent sur l’axe central du chœur.
Une basilique
La basilique est l’endroit où, chez les romains, tout le monde se rassemble pour la vie civique. La basilique est un grand plan soutenu par des colonnes. Les chrétiens ont adopté la structure de la basilique et ont considéré qu’à la tête, il y a Jésus, et que les colonnes, souvent au nombre de douze, représentent les Apôtres.
Des puits de lumière et des alvéoles sont prévus dans la bâtisse. On a commencé à bâtir des chapelles supplémentaires. Il y a un chœur qui est séparé par un muret en pierre. Sur le côté gauche du chœur, il y a le lutrin pour lire la parole de Dieu. On lit les prophéties (qui nous aident à comprendre et à intérioriser) vers le Sud et l’Évangile (la Bonne Nouvelle qui repousse les ténèbres) vers le Nord. Le Saint-Sacrement est conservé dans le tabernacle. La place du prêtre et celles des célébrants sont gardées autour de l’abside. De même, la chorale a sa place privilégiée pour marquer sa fonction sacrée.
Une église
Dans l’église, on va mettre une grille qu’on appelle jubé qui sépare complètement le chœur et de la nef.
Plus tard, on a construit des églises avec des transepts, ce qui a donné le plan en croix. Cette construction a permis d’accueillir plus de monde, notamment, en pèlerinage.
La procession, c’est l’assemblée en mouvement. C’est l’invitation à la prière. On peut faire la procession dehors mais pour pouvoir la faire dans l’église, il fallait prévoir des travées latérales immenses. Dans le cas de la cathédrale de Chartres, on peut accueillir près de deux mille personnes en prière debout dans les travées.
Ensuite, pour pouvoir prier pour les morts, se sont multipliées des chapelles et donc des autels pour qu’il puisse y avoir des multiplications de messe. Cela a conduit au développement des reliques et des saints dans les églises.
Plus tard, on a retiré le jubé pour plus de visibilité et de profondeur. Donc on a mis plus en avant le maître-autel. Sa place a donné lieu à des débats : au milieu des clercs (dans un lieu fermé) ou au milieu des fidèles ? On retrouve donc des vestiges de ces périodes dans une église ou une autre.
Aujourd’hui, ce qu’on appelle basilique est une église qui a un plan basilical ou qui a reçu la titulature d’être un grand lieu de pèlerinage.
Une église aujourd’hui
Depuis Vatican II, l’église garde le plan basilical même si certaines ont eu parfois des plans ronds (pour mettre tout le monde à égalité). Le chœur est déplacé à la croisée des transepts pour que tout le monde soit tout autour. Donc la place des uns et des autres ne pose plus de question puisque tout le monde peut aller partout. On a gardé la place de l’ambon (plutôt côté Nord) et celle du chantre (côté Sud) qui est accessible à tous.
Le tabernacle est placé à un endroit différent de celui de l’axe central, ailleurs que dans le chœur. Il doit être mis dans une chapelle (la chapelle du Saint-Sacrement).
La cuve baptismale se trouve soit au pied de l’autel, soit à l’entrée. Idéalement, elle devrait être enterrée avec sept marches comme ce qui se faisait dans le monde paléochrétien.
On a gardé les douze colonnes. Là où il n’y a pas de colonnes, on trouve douze points de consécration.
Le parvis est un lieu très important depuis toujours. C’est le lieu d’accueil des pèlerins, c’est le lieu de rassemblement. C’est aussi la « porte » de l’église.
Préparer une visite d’église pour les enfants
Avant la visite
Il faut faire des repérages de l’église avant la visite, repérer ce qu’on veut faire découvrir, se documenter. L’objectif est de pouvoir présenter l’église en racontant aux enfants ce qu’ils vont y trouver de façon qu’ils se rendent compte qu’ils vont découvrir quelque chose de beau. C’est particulièrement recommandé pour présenter les saints en narrant leurs vies.
Le Directoire pour la Catéchèse (DpC) recommande le langage narratif comme outil pour mener à bien les tâches de la catéchèse. En effet, « on note dans divers domaines culturels, la redécouverte de la narration non seulement comme outil linguistique, mais surtout comme moyen grâce auquel l’homme se comprend lui- même, comprend la réalité qui l’entoure et donne un sens à ce qu’il vit. La communauté ecclésiale prend également de plus en plus conscience de l’identité narrative de la foi elle- même, comme en témoigne l’Écriture sainte dans les grands récits des origines, des patriarches et du peuple élu, dans l’histoire de Jésus racontée dans les Évangiles et dans les récits des débuts de l’Église. » (cf. DpC §207)
Il faut donc présenter l’église avant d’être dans le lieu (pré-visite) : lors d’une séance précédente ou sur le parvis, juste avant d’y entrer.
Pendant la visite
Il faut aider les enfants à comprendre les grandes structures.
Pour cela, le mieux est de leur donner un plan vierge. Sur ce plan vierge, on met les parties différentes et en-dessous, on met les noms. Ainsi, ils pourront faire seuls la visite, chacun à son rythme, et s’arrêtant devant ce qui le touche.
Les lieux symboliques dans l’église
La porte : lieu de passage d’un monde à l’autre, une ouverture vers le mystère. Sur certaines églises, au-dessus du portail central, on voit alors l’inscription DOM MCXXIII – LUIGI-, par exemple. Cela signifie que l’église appartient au Seigneur (Dom), qu’elle a été construite en 1523 et que sa titulature, c’est-à-dire, celui dont on va faire mémoire dans cette église est Saint Louis.
Le narthex : lieu qui fait la transition entre l’extérieur et l’intérieur, le profane et le sacré. Il conduit vers la nef.
Le baptistère ou fonts baptismaux : lieu du baptême, donne à penser à un Dieu de jaillissement et de vitalité, un Dieu dont l’amour coule, sans interruption sur tout être humain, l’enveloppant de sa tendresse et de sa vigilante protection.
La nef : la partie de l’église allant de la porte à l’autel ou à la croisée des transepts. Elle est à l’image du bateau qui amène les fidèles à quitter un rivage pour un autre.
Les colonnes ou piliers : souvent au nombre de douze, elles représentent les Apôtres. Leur direction verticale attire le regard et le cœur vers le haut.
Le chœur : le but de notre cheminement, balisé par les piliers, donné à voir dès la porte. Dieu s’y rend particulièrement accessible.
L’autel : symboliquement, le point le plus haut d’une église. C’est une table sacrée où le prêtre célèbre le sacrifice du Christ par l’Eucharistie.
Le tabernacle : meuble qui abrite le ciboire contenant les hosties consacrées au cours de la messe. Le voile (conopée) ou la sculpture qui le recouvre témoigne de la présence réelle du Christ dans le Saint-Sacrement.
La croix : une boussole, une clé. Elle marque le chemin. Elle est suspendue entre ciel et terre. Elle est la porte du ciel, la porte du visible et de l’invisible.
Le crucifix de gloire : propre à l’Eure-et-Loir, c’est un crucifix à l’entrée du chœur, tout en haut, que les fidèles voient. Pour les églises qui ne sont pas toutes orientées Est-Ouest vers le soleil qui illumine l’église par l’Est le matin et par l’Ouest le soir, le crucifix de gloire permet une orientation spirituelle.
Les statues : signes de la présence protectrice et salvatrice de Dieu.
Les vitraux : ils sont là pour laisser entrer la lumière et pour nous montrer que la lumière de Dieu qui inonde une personne ou une scène est là pour nous indiquer la façon dont on va au Seigneur.
Quelques questions esthétiques
- Quel est le plan de l’église ?
- À quoi fait-il penser ?
- Comment sait-on que Jésus est présent ?
- Y a-t-il des tableaux ? À quoi servent-ils ?
- Qui sont les saints ?
- Que représentent les vitraux ?
- Combien y a-t-il d’autels ?
- Etc.