Décès du pape Benoît XVI

Joseph Ratzinger s’est éteint ce 31 décembre à l’âge de 95 ans au Vatican. Il est né en 1927 en Bavière, 265ème Pape de l’Église catholique romaine de 2005 jusqu’à sa renonciation en 2013.

BENOIT XVI, BERGER DE L’ÉGLISE

Il avait 16 ans, en 1943. Il était enrégimenté, quelque part en Allemagne. A un officier qui lui demande ce qu’il compte faire de sa vie, Joseph Ratzinger répond : « Je souhaite devenir curé de paroisse ». Paisiblement. « Il en fallait du courage pour répondre cela », commente un de ses amis, présent ce jour-là. Homme simple et sans détour, Joseph Ratzinger est devenu berger, prêtre, ordonné le même jour que son frère, pour la joie de leurs parents, Marie et Joseph ! Prêtre, aimant enseigner, plus que tout, mais qui a accepté les missions successives auxquelles il a été appelé, comme archevêque, à Munich, cardinal, à Rome pendant 25 ans avec Jean-Paul II, qu’il rencontrait tous les vendredis soir, et avec qui il déjeunait chaque mardi midi. Puis comme Pape, à l’âge auquel il aurait pu légitimement se reposer. « Sois le berger de mes brebis ». C’est avec les bergers de Bethléem que nous avons terminé cette octave de Noël. Benoît XVI a été un berger à leur image.

La culture de la rencontre

Les bergers, nous dit l’Évangile, se hâtent d’aller à Bethléem et rencontrent Marie et Joseph, avec le nouveau-né, couché dans la mangeoire. Ces bergers, des hommes solitaires, aimant la quiétude, décident de partir, d’aller à la rencontre, de faire connaissance, de dis-cuter, dialoguer… ils entrent dans une culture de la rencontre. Benoît XVI, c’est profondément cela : la culture de la rencontre. Rencontre, sitôt élu Pape, avec les jeunes, aux JMJ de Cologne. Rencontre avec le monde de la culture, à Paris, avec ce magnifique discours des Bernardins sur l’origine de la culture européenne. Rencontre avec le monde politique, aux Parlements anglais et allemand, avec ses interventions d’une justesse magistrale pour aujourd’hui. Rencontre et dialogue avec nombre de philosophes, Habermas et bien d’autres, à Ratisbonne ou ailleurs. Rencontre et dialogue avec le monde, le continent de l’athéisme : un livre, paru en cet automne 2022, est un dialogue avec un mathématicien athée, livre intitulé : En route à la recherche de la vérité. Expression caractéristique de son élan intérieur, à la suite des bergers de Bethléem.

Le goût de la transmission

L’Évangile de Noël précise alors que les bergers, avec Marie et Joseph, racontent ce qui leur a été annoncé. Ils transmettent ce qu’ils ont reçu. Recevoir et transmettre. Benoît XVI, c’est profondément cela aussi : le goût de la transmission. Comme les bergers, il s’agit de recevoir la Parole de Dieu, de recevoir l’héritage des Pères, saint Augustin, saint Bonaventure et tant d’autres. Recevoir l’œuvre des théologiens, des maîtres, Guardini, Newman et bien d’autres. Recevoir, scruter, assimiler cet héritage. Le rendre vivant, actuel, avec la Commission théologique internationale, la Commission biblique pontificale. Le transmettre, avec le Catéchisme de l’Église catholique, dont il a coordonné la rédaction, à la demande de Jean-Paul II. Avec ses propres catéchèses du mercredi matin, à Rome, place St-Pierre ou salle Paul-VI. Transmettre, pour être solides dans la foi, « enracinés dans le Christ » (thème biblique des JMJ de 2011). De son expérience de la guerre, il a tiré cette nécessité d’une foi forte. Car un monde sans Dieu devient un monde inhumain. Et une faible théologie est ba-layée par les bourrasques du monde.

Le primat de la prière

Les bergers de Bethléem repartent, nous dit l’Évangile, en glorifiant et en louant Dieu. Louer Dieu ensemble : c’est la liturgie. Benoît XVI a été marqué, enfant, par la prière de l’Église, la piété des fidèles, dans un sanctuaire marial proche de chez lui. Benoît XVI, c’est le sens de la liturgie, de la beauté de la liturgie, avec cette étude érudite, L’esprit de la liturgie. Liturgie adossée sur la vie de prière, personnelle et silencieuse. A l’image de Marie, dans cet Évangile de Noël, qui « retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur ». Elle médite « l’évènement Jésus-Christ » dans son cœur : c’est ce que Benoît XVI nous a offert à travers les trois tomes intitulés simplement Jésus de Nazareth. Sa synthèse de 80 ans de méditation, de prière personnelle. Benoît XVI, c’est le primat de la prière. Ce que nous montre le choix de ce saint patron : Benoît, premier moine d’Occident, gardien de la prière dans l’Église. C’est ce qu’il nous a fait vivre dans l’adoration eucharistique, lors des JMJ de Madrid, dans un silence impressionnant. C’est son retrait, en 2013, au monastère Mater Ecclesiae, au Vatican, pour continuer sa mission dans la prière.

Aujourd’hui, remercions le Seigneur pour le berger que Benoît XVI fût pour nous. Qu’il continue à être, par son héritage, pour l’Église. Le Pape François, dans l’exhortation La joie de l’Évangile (n°7), confiait : « Je ne me lasserai jamais de répéter ces paroles de Benoît XVI qui nous conduisent au cœur de l’Évangile : ‘À l’origine du fait d’être chrétien il n’y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais la rencontre avec un événement, avec une Personne, qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive’ » (Dieu est amour, n°1).

Père Sébastien ROBERT, vicaire général

Une messe a été célébrée jeudi 5 janvier à la cathédrale de Chartres, présidée par Mgr Philippe Christory pour prier et rendre hommage à Benoît XVI.