#308 « Viens Seigneur Jésus, viens parmi nous ! »
Comment ne pas évoquer l’ouverture de la cathédrale Notre Dame de Paris les samedi 7 et dimanche 8 décembre en la fête de l’Immaculée Conception ? Effectivement, pour reprendre les mots du président de la République, y entrer c’est vivre un choc d’espérance. L’espace est magnifique et lumineux. Je m’y suis rendu avec le désir de prier, de confier à Dieu le diocèse de Paris qui fut le mien, dans cet espace sacré où j’ai reçu des mains de Monseigneur Lustiger l’ordination presbytérale en 1992. J’ai prié sur sa tombe, lui qui dort paisiblement en attendant la résurrection finale dans le chœur où chante magnifiquement la maîtrise de Notre-Dame. Dieu était au centre des deux célébrations d’ouverture. Monseigneur Laurent Ulrich a pris la place du Christ au milieu de nous face au monde politique présent avec respect, pour indiquer le chemin et nous présenter le maître du lieu, Jésus-Christ. Dans notre monde politique agité, nos cathédrales sont de sublimes oasis de beauté qui offrent à tous une invitation à la paix intérieure et à lever les yeux pour échapper aux médiocrités politiques et à la morosité sociale. Jésus-Christ n’a-t-il pas promis de nous donner sa paix, non pas comme le monde la donne mais comme il nous la transmet, avec amour et compassion ? Son invitation est permanente : « venez à moi ». Si vous avez la chance d’entrer dans cette magnifique église, n’omettez pas de prier pour vous mettre en présence du Christ, car vous entrez alors dans la demeure de Dieu. Comme Dieu le dit à Moïse « Retire les sandales de tes pieds, car le lieu où tu te tiens est une terre sainte ! (Ex3,5) »
On dit que l’Espérance est une vertu qui nous fait voir le Ciel que nous attendons patiemment. À Chartres, comme à Paris, le visiteur lève spontanément son regard vers les voûtes. Les bâtisseurs l’avaient voulu ainsi : l’édifice est une métaphore du ciel. Il nous invite à regarder vers les hauteurs et exprime notre espérance de la Jérusalem céleste. L’Espérance est tellement nécessaire aux hommes à quelques jours de Noël. Nous la désirons pour tous les syriens conscient de la grave fracture ethnique en leur pays, en priant pour les chrétiens d’Homs, d’Alep, de Damas et d’ailleurs, certains parlant et célébrant le Christ dans sa langue originelle, l’araméen. Pourront-ils vivre en paix dans ce merveilleux pays défiguré et ruiné par la guerre et une dictature criminelle ? Ces situations méritent notre prière car là-bas tout est possible, le mal ou le bien.
Le temps de l’Avent progresse vers la fête de la nativité du Sauveur. En lisant le prophète Isaïe, chantre d’une promesse à venir et voix de Dieu qui annonce un messie, résonnent ces mots « consolez, consolez mon peuple » (Is 40,1). Là est le désir profond de Dieu qui déclare que le crime est expié. En effet, le peuple hébreu avait trahi le Dieu de leurs pères en ouvrant la porte de leur cœur obscurci aux faux dieux, en désobéissant à la parole des prophètes que Dieu leur envoyait. Aussi Isaïe annonce enfin le message nouveau, celui de la reconstruction de l’alliance, anticipant le retour à Jérusalem pour le peuple déporté et rendu esclave à Babylone. Bientôt « se révèlera la Gloire du Seigneur, et tout être de chair verra que la bouche du Seigneur a parlé. » Ainsi l’amour infini de Dieu est comparable au désir du bon berger qui rassemble ses brebis, qui secourt la brebis perdue, qui conduit ses brebis à la bergerie et les nourrit dans l’enclos protégé des prédateurs. « Il les porte sur son cœur, il mène les brebis qui allaitent ». Dieu demande au prophète d’élever la voix : « Monte sur une haute montagne, toi qui portes la bonne nouvelle à Sion. Élève la voix avec force, toi qui portes la bonne nouvelle à Jérusalem. Élève la voix, ne crains pas. Dis aux villes de Juda : « Voici votre Dieu ! » (Is 40,9) En notre époque, Dieu cherche des voix qui parlent en son nom aux humains qui n’ont pas accès à sa parole. Pensons à ces millions d’enfants qui ne connaissent ni Jésus, ni l’Évangile, ni son message de miséricorde. Étonnamment les demandes de baptêmes continuent à se manifester dans l’Église de France. Pourquoi ces catéchumènes viennent-ils vers Jésus-Christ ? Comme le psalmiste l’écrivait il y a trois mille ans, nos contemporains recherchent la paix, la source de la vérité, la parole de pardon, la fraternité qu’ils portent en germe en eux et voient que l’Église est présente à proximité d’eux et ils viennent frapper à sa porte avec ce murmure discret de l’Esprit en eux : « J’ai cherché le Seigneur, il m’a répondu : de toutes mes frayeurs, il m’a délivré. » (Ps 33,4) Alors ils ajoutent « je demande le baptême ». Pour répondre à leur désir qui ne fait pas de bruit, nous catholiques devons demeurer disponibles et attentifs à leur appel, y répondre par l’écoute, en entrant en conversation avec ces hommes et ces femmes qui aspirent à la rencontre de Jésus.
Le temps de l’Avent nous prépare aux célébrations de la nativité. Le couleur violette marque la pénitence et la conversion, elle signifie la nécessaire purification de notre intériorité spirituelle. Le catéchisme le précise : « En célébrant la venue du Christ dans la chair, l’Église exhorte à une conversion sincère et à la vigilance dans l’attente de son retour dans la gloire » (CEC 1095). Pour aller à la crèche, ne devons-nous pas nous désencombrer du superflus, en refusant la course aux achats compulsifs encouragés par les promotions et autre black Friday ? La simplicité doit guider nos choix. Il est fort possible que des amis et des personnes seules attendent un mot, une carte, un appel de notre part. Nos églises sont parées, une crèche y est installée. Sa présence n’est-elle pas le signe qu’une communauté de chrétiens y résident et en entretiennent la beauté afin que des passants s’y arrêtent un instant ? Dans certaines paroisses de France, comme j’ai pu le vivre avec beaucoup de joie en étant curé, des messes tôt le matin appelées messes de rorate rassemblent des fidèles à la seule lueur de bougies. Cette expression désigne la rosée du matin qui descend sur l’herbe à l’instar du Verbe divin descendu dans le sein de Marie. Alors la parole et l’eucharistie ouvrent la journée et éclairent rencontres et travaux qui suivront. Les dimanches d’Avent, on ne chante pas le Gloria en attendant de le reprendre avec les anges et les bergers quand nous accueillerons l’enfant nouveau-né lors de la nuit de Noël. Ainsi tout est calme, c’est un appel au silence, à la méditation et à la vigilance ce qui indique en réalité un appel à veiller dans la prière. En nos maisons, nous retrouvons la douceur et le bienfait de demeurer calmes et suspendus à l’avènement du Sauveur. Nos foyers sont ces petites églises domestiques où la lecture de l’évangile se fait en famille. Essayons de vivre cela durant les prochains jours.
À Chartres, le Jubilé des 1000 ans de la crypte permet de parcourir cet espace en méditant la vocation du chrétien qui marche avec Jésus-Christ, accompagné de la Vierge Marie, présence maternelle. Durant les prochains jours et lors des vacances scolaires, pourquoi ne pas prévoir votre venue afin de vivre le parcours jubilaire avec enfants ou amis ? « En accueillant l’Annonciation et en donnant son “oui”, Marie est devenue la Mère de Jésus et la Mère de tous. Son exemple guide les fidèles durant l’Avent à se préparer dans la foi et la disponibilité à accueillir le Sauveur » (CEC 484-487). Regardons l’étoile du matin, la Vierge Marie. Invoquons-la et, comme elle le fit, conservons en nous-même le souvenir des grâces divines, la mémoire de ces moments lorsque Dieu nous a touchés, encouragés voire consolés. L’Esprit Saint vient nous entourer et il éclaire notre vie. Marie a le désir profond que nous accueillons son Fils en nous, en faisant nôtre sa Parole lumineuse.
Prions ensemble et je vous propose les paroles en latin d’abord puis en français de l’hymne traditionnelle de l’Avent, maintenant que vous comprenez le sens du mot rorate.
Rorate cæli desuper, et nubes pluant iustum : aperiatur terra, et germinet salvatorem.
Traduisons :
Cieux, répandez d’en haut votre rosée, et que les nues fassent pleuvoir le Juste : que la terre s’ouvre et qu’elle enfante le Sauveur.
Notre-Père