#190 «Heureux le peuple dont le Seigneur est le Dieu !»

Ce 8 septembre est fêtée la Nativité de la Vierge Marie, envers qui nous posons un acte de grande confiance pour la mission de notre Église qui est en Eure & Loir et aussi pour nous-mêmes. Cette fête est promue comme le prélude de la nativité de Jésus, annonçant celui qui est attendu comme le soleil de justice qui vient nous visiter, le Christ. Marie est la mère du Sauveur. Chaque fois qu’elle est honorée, elle nous demande d’accueillir son fils Jésus. La Bible ne parle pas de la naissance de Marie. C’est un texte apocryphe, le proto-évangile de saint Jacques, qui révèle comment ses parents, Anne et Joachim, espèrent un enfant qui tarde à venir. Âgés, ils sont visités par un ange qui leur annonce qu’une fille leur sera donnée. Nous pouvons nous interroger sur la valeur historique de ce récit qui date du IIIe siècle. En effet, est-ce une belle histoire inventée plus tard pour compléter le récit biblique ? Ou est-ce une véritable source historique ? Nous devons nous rappeler que la culture de cette époque est portée par la mémoire. Les gens n’ont pas de livres. Ils reprennent des contes et des récits que l’on reçoit et se partage sans cesse, au coin du feu, lors des veillées et des pèlerinages. Le métier de conteur est bien présent dans la vie des villages. Aussi, et on peut le voir encore dans des peuples plus reculés, ces faits sont transmis avec beaucoup de précision de génération en génération. Nous pouvons penser que les détails sur la naissance de la Vierge Marie, la joie de ses parents, le fait qu’elle fut éduquée au Temple, sa pureté et son amour de Dieu, tout ceci est vrai. Marie naît naturellement au sein d’un couple pauvre, ceux que l’on nomme les pauvres du Seigneur – anawim en hébreu -, et elle reçoit dès sa venue un appel à la sainteté qu’elle choisit de vivre parfaitement. La sainteté de ses parents la soutient. Elle se prépare à recevoir sa vocation de mère du Fils de Dieu, sans en avoir encore connaissance. La liturgie de cette fête célèbre cet amour de prédilection du Père pour Marie. Quelle espérance ! N’est-ce pas essentiel alors que la guerre continue en Ukraine ?

Quand Dieu nous confie à Notre-Dame, il manifeste tout le bien qu’il nous veut. Nous recevons par elle protection et amour maternel. Nous la prions avec fidélité. Elle nous demande d’écouter son fils Jésus par qui se révèle le Père éternel. Pour aller vers le Père, tout croyant passe par Jésus. Jésus est le seul chemin. Marie nous dit de faire ainsi. Elle se fait messagère et médiatrice. Or parfois le doute nous saisit. Dieu est-il réellement présent ? Existe-t-il ? Si ce n’était pas le cas, comment pourrions-nous expliquer l’avènement du monde, sa perfection et sa complexité, notre présence humaine au sein de la nature ? C’est pourquoi, je vous propose de poser un acte de foi quotidien. Il ne s’agit pas de la foi dite du charbonnier qui semble croire sans réfléchir, mais de poser cet acte en toute conscience et intelligence, en regardant avec attention le monde qui nous entoure, en admirant sa beauté certes souvent dégradée par les hommes et pourtant si grandiose, en nous émerveillant de l’amour et de l’amitié que nous avons les uns avec les autres. L’amour reste un mystère qui ne peut s’expliquer par des réactions chimiques ou encore par les effets des hormones qui s’agitent en nous, il est au-delà de ce que nous percevons et voyons, l’amour a une source ineffable et invisible, il est une grâce qui vient de Dieu. Aussi, comme la Vierge Marie, nous faisons un choix libre et éclairé, Dieu est présent et Jésus nous le révèle, nous lui disons combien sa présence est précieuse. Alors tout le reste viendra par surcroît, nos actes seront guidés et soutenus par Lui. Alors le bien jaillira car nos cœurs en auront le désir, nous serons témoins de sa présence.

Un psaume m’interpelle car il commence par une béatitude, c’est-à-dire une promesse de bonheur. Jésus inaugure son discours sur la montagne par les béatitudes (Mt 5-7). C’est un passage souvent choisi pour les mariages voire les funérailles. Ces versets ne sont pas des injonctions mais des paroles d’encouragement à prendre soin de soi en nous reliant à la source, le cœur de Jésus qui, le premier, incarne par sa vie ces béatitudes. Celle du psaume dit ceci : « heureux le peuple dont le Seigneur est le Dieu » (Ps 32, 12) Quand le psalmiste écrit, Jésus n’est pas encore venu. Aussi le mot Seigneur ne le désigne pas. On peut comprendre qu’il désigne l’être supérieur en qui l’homme met toute sa confiance, en l’occurrence Dieu et non pas quelques fausses divinités païennes ou un bien trompeur tel l’argent. Qu’arrive-t-il à ce croyant qui choisit Dieu seul comme maître et Seigneur ? Le psaume l’explicite « il est pour nous un appui, un bouclier. La joie de notre cœur vient de lui, notre confiance est dans son nom très saint. » (Ps 32, 20-21) Qui nous sauvera de toutes ces angoisses qui atteignent nos contemporains, qui nous donnera la certitude que nous ne sommes pas comme jetés dans un monde absurde ballotté par des flots tempétueux ? La joie de notre cœur ne peut nous être ôtée lorsque nous chantons ces psaumes et louons Dieu. Cultivons cet élan intérieur. Nourrissons-le par notre prière fidèle et quotidienne. Vivre sa foi aujourd’hui appelle à une forme d’héroïsme, le don de soi entier par amour de Dieu. Si nous sommes ce que nous devons être, le monde connaîtra le Seigneur son Dieu.

En cette rentrée de septembre, nos paroisses relancent les missions et l’évangélisation. Ces choix nous appartiennent. Si nous sommes pauvres en moyens, avec moins d’argent et des coûts financiers en hausse, souvent trop peu de forces humaines, lorsque nous croyons en Dieu et posons un acte de foi, nous sommes riches de la présence du Saint Esprit. Croyons que nous sommes accompagnés et non pas abandonnés. Ensemble, en communauté, nous sommes soutenus.

Cette attitude demande la vérité et l’engagement de la foi. Jérémie, le grand prophète de l’exil à Babylone, recommande la droiture du cœur. Jérusalem est menacé par l’ennemi. Aussi dit-il de la part de Dieu : « rendez meilleurs vos chemins et vos actes : je vous ferai demeurer dans ce lieu. » (Je 7, 3) Pour les juifs, ce lieu est celui où il y a le temple, la demeure de Dieu présent dans le Saint des Saints, un espace sacré où personne ne peut entrer sauf le Grand-Prêtre qui préside au culte du peuple juif. C’est une magnifique promesse. Ne s’applique-t-elle pas à chacun de nous ? Rendre meilleurs nos chemins et nos actes sous-entend des choix, surtout celui, fondamental pour tout disciple, de se laisser inspirer et éclairer par le Saint Esprit plutôt que de penser que nous connaissons ou que nous maîtrisons le cours de l’histoire. Jérémie, dans la suite de ce chapitre 7, prévient ceux qui rendent un culte en apparence mais qui volent, tuent, commettent l’adultère, font des faux serments, brûlent de l’encens pour le dieu Baal, suivent d’autres dieux inconnus. Quelques siècles plus tard, Jésus dénoncera les orgueilleux, les pharisiens, les prétentieux, qui font des ablutions extérieures mais dont le cœur est noir, empli de péchés. Le dieu Baal mentionné par le prophète symbolise nos attachements malfaisants et nos addictions impures qui nous éloignent de la voie du disciple. Or ne sommes-nous pas appelés et destinés à la sainteté, à vivre dans la lumière divine, à briller de l’amour que Dieu nous insuffle auprès des personnes de notre époque ? Si le mal fait souffrir et suscite tant de drames, avec toutes les formes de violences faites aux enfants, aux femmes, aux petits, nous catholiques réfléchissons ensemble sur nos projets pastoraux pour discerner comment cet amour peut être partagé, comment l’évangile peut être proclamé, comment la fraternité peut être promue. Sous la plume de Jérémie on parle de la colère de Dieu qui ne se laisse pas amadouer par les faux cadeaux qu’offrent les hypocrites par leurs offrandes faites au Temple. On ne se moque pas de Dieu par tromperie, on choisit de vivre dans sa lumière. Et sa lumière est un don à recevoir, l’Esprit lui-même est lumineux. Jésus est la lumière du monde et il nous la communique abondamment si nous choisissons de la recevoir.

En ce début d’année, l’Esprit Saint nous propose le service de l’Église. Dans l’Évangile, Jésus suggère de prendre la dernière place par délicatesse et discrétion, avec la possibilité que le maître de maison nous indique la place d’honneur. L’humilité se vit dans l’action, elle n’est pas une passivité emprunte de paresse. « Accomplit les choses que tu dois faire dans l’humilité » dit Ben Sirac le sage. Chacun a des talents et des charismes qu’il peut mettre en œuvre au service de la mission à laquelle le Seigneur l’appelle. Ce peut-être une mission de responsabilité, en vue au sein de la communauté. Ce peut-être une mission plus discrète voire cachée. Cependant toutes ont la même dignité même si elles ne revêtent pas la même importance pratique. Comment servir avec humilité ? Regardons la Vierge Marie qui accueille l’ange Gabriel, se met à son écoute et agit avec empressement. Voici une belle attitude pour discerner notre place et notre service. La mission nous attend et Jésus-Christ saura nous inviter pour nous offrir le meilleur. Si nous répondons, notre cœur sera en joie et la paroisse goûtera la nouveauté de la mission pour notre bonheur.

À nouveau, nous prions la Vierge Marie pour la paix. Nous espérons au-delà des faits rapportés par les médias que des hommes et des femmes de talent bâtissent déjà les prémisses d’une paix durable pour l’Europe orientale.

Vierge Marie, Notre-Dame de Paix

tu es venue jusqu’à nous

pour nous porter la paix de Dieu, Jésus, ton enfant.

 

Avec tous ceux et celles qui t’ont invoquée

dans l’épreuve et le désarroi, ou avant de s’élancer

vers les nouveaux rivages de la mission,

nous venons près de toi avec confiance

car tu es notre Mère.

 

Réjouis-toi, humble servante du Seigneur,

en ton cœur, Dieu établit sa demeure parmi nous

Dans le cœur de Jésus, ton enfant,

Il nous révèle sa tendresse et sa miséricorde.

 

Au pied de la Croix, 

tu accueilles le pardon et la paix qu’Il nous obtient.

Conduis-nous à la source d’eau vive de son cœur.

 

Prie pour nous, prie avec nous, Sainte Mère de Dieu,

pour que nous soyons des artisans de réconciliation

et des serviteurs de la paix.

Nous connaîtrons alors la paix du cœur

promise à ceux et qui marchent avec toi

sur les chemins de l’Évangile

pour que le monde ait la vie 

et qu’il l’ait en abondance.

Amen.